This HTML edition by Joseph H. Peterson, Copyright © 2003, 2005, 2006. All rights reserved.
This is another French Grimoire or handbook of magic.
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Catalog entry reads:
Author: Albert, Petit. Title: Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du petit Albert. Edition: Nouv. éd., cor. & augm. Published: Lyon, Héritiers de Beringos fratres, 1782. Description: 264 p. illus., plates (partly fold.) 14 cm. Library Info: TC Andersen Library Rare Books Small 157.4 Al14lF Non-Circulating Subject: LC Magic. Charms. Medicine, Magic, mystic, and spagiric. Material Type: bks Sys. no. 000307304 U of M copy jumps from p. 50 to p. 59.
Page 11.
VOici une nouvelle édition du livre
des merveilleux secrets du Petit Albert,
connu en Latin soius le titre de Alberti
Parvi Lucii Libellus de mirabilibus
naturæ arcanis: l'auteur, à qui on l'attribue,
ayant été un de ces grands
hommes, qui par le peuple ignirant ont
été accusés de magie; (c'étoit autrefois
le sort de tous les grands esprits qui possédoient
quelque chose d'extraordinaire
dans les sciences, de les traiter de magiciens.)
C'est peut-être par cette raison
que ce petit trésor est devenu si rare;
parce que les superstitieux ont fait scrupule
de s'en servir, il s'est presque comme
perdu: car une personne distinguée dans
le monde a eu la curiosité (à ce que l'un
assure) d'en offrir plus de mille florins
pour un seul exemplaire; encore ne l'a-t-on
pu découvrir que depuis peu dans
LE véritable curieux, qui desire de
profiter dans les secrets les plus rares
& les plus cachés de la nature, doit,
avec épanchement de cœur, ouvrir
les yeux de son entendement sur ce
que je lui ai ramaffé avec beaucoup
de soin & d'exactitude dans ce petit
volume.
Il peut bien être appellé un trésor
universel, puisque dans sa petitesse il
renferme des merveilles capables de
faire plaisir à tout le genre humain.
Or, afin de garder quelque ordre
méthodique dans ce mien ouvrage,
& de le rendre plus utile & plus agréable
à mes lecteurs, je distinguerai les
matieres chacune séparément, de peur
que le mêlange indiscret n'apporte
une confusion embarrassante; je veux
dire, que quand je traiterai, par
exemple, des secrets de l'amour ou de
la guerre, je proposerai tout de suite,
& sans interruption, ce que je voudrai
donner sur ces sujets: ou, si par
une liaison naturelle, je traite ailleurs
Il est bon d'avertir pareillement mes
lecteurs, que, tout surprenans que
puissent paroître les secrets que je leur
propose dans ce petit volume, ils
n'excedent point les forces occultes
de la nature; c'est-à-dire, de tous les
êtres créés qui sont épars dans ce vaste
univers, soit dans les cieux, dans les
airs, sur la terre & dans les eaux. Car
ainsi qu'il est écrit que le sage dominera
les astres, par sa prudence, de
même doit-on être persuadé que les
astres par leurs aimables influences
profiteront au sage qui sera instruit de
leur ascendant.
Or, il est besoin de savoir que par
l'ascendant des astres on doit entendre leurs favorables dispositions
entre elles; comme font leurs aspects
ou regards, leurs entrées & demeure
Ceux qui n'ont point étudié dans
les sciences sublimes de la philosophie
& astronomie, pourront, ou consulter
les astrologues, ou se servir d'un
bon almanach quand ils voudront
mettre en pratique quelque secret qui
dépend des aspects ou conjonction
des astres, afin que l'exactitude qu'ils
apporteront dans l'opération qu'ils
feront, rendre l'issue bonne, utile &
favorable.
Que l'on n'attribue point à magie
ou diablerie, si dans quelques-uns des
merveilleux secrets que je donnerai,
on se sert de certains paroles ou figures;
car elles ont leur vertu & efficacité
[9]
indépendamment de la magie, &
les anciens sages hébreux s'en sont
servis avec beaucoup de religion.
L'histoire & la chronique de France
nous apprennent que Charlemagne
reçut d'un pape un petit livre qui n'étoit
composé que de figures & de paroles
mystérieuses, dont ce prince se
servit fort heureusement dans une infinité
d'occasions, & ce petit livre a
pour titre, enchiridium Leonis papæ.
Les merveilles que ce petit livre a produites
en faveur de ceux qui s'en
sont servis, l'ont rendu recommandable
en dépit de ceux qui l'ont voulu
décrier comme superstitieux.
Enfin j'avertis mes lecteurs qu'ils ne
trouveront rien de commun & de trivial
dans ce mien petit ouvrage; c'est
comme un extrait & un élixir de ce
que la nature perfectionnée & aidée
de l'art, a de plus merveilleux dans
ses vertus occultes; je ne me laisse
point séduire à la vanité en les produisant
comme de moi-même & de mon
[10]
estoc: j'avoue ingénument que je les
ai tirés des écrits des plus fameux philosophes
qui ont pénétré avec une
admirable application tout ce que la
nature a de plus curieux & de plus
caché; il est vrai que je ne les propose
pas ici avec témérité, puisqu'il
n'y en a presque pas un dont je n'aie
eu le plaisir de faire l'expérience par
moi-même.
Comme il n'y a rien de plus naturel
à l'homme d'aimer & de se faire aimer,
je commencerai l'auverture de
mon petit trésor par les secrets qui
conduisent à cette fin; & sans m'amuser
à invoquer Vénus & Cupidon,
qui sont les deux divinités dominantes
sur cette noble passion de l'homme,
je dirai que dame nature, qui fait
toutes choses pour l'homme, produit
tous les jours grand nombre de créatures
qui lui deviennent favorables
[11]
dans le succès de ses amours. L'on
trouve assez souvent au front du poulain
de la cavale un morceau de chair,
dont je donne ici la figure, qui est
d'un merveilleux usage en fait d'amour:
car si l'on peut avoir ce morceau
de chair que les anciens ont appellé
hippomanes, on le fera sécher
dans un pot de terre neuf vernissé,
dans un four, quand le pain en est
tiré, & en le portant sur soi, & le
faisant toucher à la personne dont
on voudra être aimé, on réussira: si
l'on peut avoir la commodité d'en
faire avaler seulement la grosseur de
deux pois dans quelque liqueur, confiture
ou ragoût, l'effet sera encore
infaillible; & comme le vendredi est
le jour consacré à Vénus, qui préside
aux mysteres d'amour, il sera bon de
faire l'expérience ce jour-là. Voyez
ce que dit le célebre Jean-Baptiste
Porta, des surprenantes propriétés
de l'hippomanes pour causer l'amour.
Tirez de votre sang un vendredi du
printems; mettez-le sécher au four
dans un petit pot, comme est dit ci-dessus,
avec les deux couillons d'un
lievre & le foie d'une colombe: réduisez
le tout en poudre fine, & en
faites avaler à la personne sur qui
vous aurez quelque dessein, environ
la quantité d'une demi-drachme; & si
l'effet ne suit pas à la premiere fois,
réitérez jusqu'à trois fois, & vous
serez aimé.
Vivez chastement au moins cinq ou
six jours, & le septieme, qui sera le
vendredi, si faire se peut; mangez &
bovez des alimens de nature chaude
qui vous excitent à l'amour; & quand
vous vous sentirez dans cet état,
tachez d'avoir une conversation familiere
avec l'objet de votre passion,
& faites ensorte qu'elle vous puisse
[13]
regarder fixement, vous & elle, seulement
l'espace d'un ave Maria: car les
rayons visuels se rencontrant mutuellement,
seront de si puissans véhicules
de l'amour, qu'ils pénétreront jusqu'au
cœur, & la plus grande fierté &
la plus grande insensibilité ne pourront
leur résister. Il est assez difficile de réduire
une fille, qui a de la puder, à
regarder fixement un jeune homme
durant quelque espace de tems; mais
on la pourra obliger à cela, en lui disant,
en badinant, qu'on a appris un
secret de deviner par les yeux, si l'on
doit être bientôt marié, si l'on vivra
long-tems, si l'on sera heureux dans son
mariage, ou quelqu'autre chose semblable
qui flatte la curiosité de la personne,
& qui la fasse résoudre à regarder
fixement.
Ayez une bague d'or garnie d'un
petit diamant, qui n'ait point été
portée depuis qu'elle est sortie des
[14]
mains de l'ouvrier, enveloppez-la
d'un petit morceau d'étoffe de soie, &
la portez durant neuf jours & neuf
nuits, entre chemise & chair à l'opposition
de votre cœur. Le neuvieme
jour, avant soleil levé, vous graverez
avec un poinçon neuf en dedans de la
bague ce mot, Scheva. Puis tacherez
par quelque moyen d'avoir trois cheveux
de la personne dont vous voulez
être aimé, & vous les accomplerez
avec trois des vôtres, en disant: ô
corps, puisse-tu m'aimer, & que ton
dessein réussisse aussi ardemment que le
mien, par la vertu efficace de Scheva!
Il faudra nouer ces cheveux en lacs
d'amour, ensorte que la bague soit àpeu-près
enlacée dans le milieu du
lac; & l'ayant enveloppée dans l'étoffe
de soie, vous la porterez derechef
sur vorte cœur autres six jours,
& le septieme jour vous dégagerez la
bague du lac d'amour, & ferez ensorte
de la faire recevoir à la personne
aimée: toute cette opération se doit
[15]
faire avant le soleil levé & à jeun.
Pour ne rien dire qui choque la
bienséance, je ne copierai point ici
ce que j'ai lu dans un très-habile
médecin, touchant la vertu nompareille
du sperme ou semence humaine
pour induire à l'amour, d'autant que
l'expérience ne s'en peut faire sans
violenter la nature qui nous fournit
assez d'autres moyens. Ayez donc
plutôt recours à l'herbe que l'on
nomme ennula campana, dont je
donne ici la figure.
[Figure 1. HIPOMANES]
[3]
AVERTISSEMENT
QU'IL FAUT LIRE.
[5]
LE TRÉSOR
DES
MERVEILLEUX
SECRETS
De l'amour réciproque de l'homme & de la femme.
[12]
Autre pour l'amour.
Autre pour l'amour.
Autre pour l'amour.
Autre pour l'amour.
[figure]
Il faut la cueillir à jeun la veille de
la saint Jean au mois de juin avant
soleil levé, la faire sécher, réduire
en poudre avec de l'ambre gris; &
l'ayant portée durant neuf jours sur
votre cœur, vous tacherez d'en faire
avaler à la personne dont vous desirez
d'être aimé, & l'effet suivra. Le
cœur d'hirindelle, de colombe, de
passereau, mêlé avec le propre sang
[16]
de la personne qui veut se faire aimer,
a le même effet.
On peut aussi réussir avec beaucoup
de succè dans cette entreprise
par le secours des talismans faits sous
la constellation de Vénus; je donnerai
dans la suite de ce petit ouvrage
des modeles gravés en taille douce de
sept talismans que l'on peut faire
sous les auspices des sept planetes, &
je parlerai de la maniere méthodique
de les faire, & des vertus qu'ils renferment:
on pourra voir pour le
sujet que je traite celui de Vénus.
Ces talismans ont été composés par
les plus sages d'entre les cabalistes,
& sont dressés sur des nombres mystérieux,
& des figures hiéroglyfiques
convenables aux planetes d'où ils tirent
leurs propriétés; ils les ont appellés
les cachets ou les sceaux des
planetes ou célestes intelligences.
[17]
Il y a des secrets que l'on appelle
chez les sages cabalistes, pomme d'amour,
& ils se pratiquent en cette maniere.
Vous irez un vendredi matin
avant soleil levé dans un verger fruitier,
& cueillerez sur un arbre la plus
belle pomme que vous pourrez; puis
vous écrirez avec votre sang sur un
petit morceau de papier blanc votre
nom & surnom, & en une autre ligne
suivante, le nom & surnom de la
personne dont vous voulez être aimé,
& vous tacherez d'avoir trois de ses
cheveux, que vous joindrez avec trois
des vôtre qui vous serviront à lier le
petit billet que vous aurez écrit avec
une autre, sur lequel il n'y aura que
le mot de Scheva, aussi écrit de votre
sang, puis vous fondrez la pomme en
deux, vous en ôterez les pepins, &
en leur place vous y mettrez vos billets
liés des cheveux, & avec deux
petits brochettes pointues de branches
[18]
de myrthe verd, vous rejoindrez
proprement les deux moitiés de pomme
& la ferez sécher au four, ensorte
qu'elle devienne dure & sans humidité
comme les pommes seches de carême;
vous l'envelopperez ensuite dans des
feuilles de lauriers & de myrthe, &
tacherez de la mettre sous le chevet
du lit où couche la personne aimée,
sans qu'elle s'en apperçoive, & en peu
de tems elle vous donnera des marques
de son amour.
Il ne suffit pas à l'homme de se faire
aimer de la femme passagérement &
pour une fois seulement; il faut que
cela continue, & que l'amour soit
indissoluble, & par ainsi il a besoin
d'avoir des secrets pour engager la
femme à ne point changer ou diminuer
son amour. Vous prendrez
donc à ce sujet la moëlle que vous
trouverez dans le pied gauche d'un
loup, vous en ferez une espece de
[19]
pommade avec de l'ambre gris & de la
poudre de Cypre, vous porterez sur
vous cette pommade, & vous la ferez
flairer de tems en tems à la femme,
qui vous aimera de plus en plus.
Comme il se pourroit faire que la
femme se dégoûteroit de l'homme s'il
n'étoit robuste dans l'action de Vénus,
il doit se précautionner non-seulement
par les bons alimens, mais encore
par des secrets que les anciens
& modernes rechercheurs des merveilles
de la nature ont éprouvés. Il
faut, disent-ils, composer un baume
de la cendre de stellion, d'huile de
mille-pertuis & de civette, & en oindre
le grand doigt du pied gauche &
les reins une heure avant que d'entrer
au combat; & l'on en sortira avec
honneur & satisfaction de sa partie.
La pommade composée d'oing de
[20]
jeune bouc, avec de l'ambre gris &
de la civette, produit le même effet,
si l'on en frotte le gland du membre
viril; car cela produit un chatouillement
qui donne un merveilleux plaisir
à la femme dans l'action du coït.
Si le mari trouve que sa femme soit
de complexion froide, & ne se plaise
au déduit, qu'il lui fasse manger les
couillons d'oie, & le ventre de lievre,
assaisonnés de fines épices, & de
tems en tems des salades où il y ait
beaucoup de roquette, de satyrion &
de céleri avec vinaigre rosat.
Nos anciens assurent que l'oiseau
rain remede contre le sortilege de l'aiguillette
nouée; si on le mange rôti à
jeun avec du sel bénit... si on respire
la fumée de la dent brûlée d'un homme
mort depuis pen, on sera pareillement
[21]
délivré du charm... Le même effet
arrive, si on met du vif argent dans
un chalumeau de paille d'avoine ou
de paille de froment, & que l'on
mette ce cha;umeau de paille de froment
ou d'avoine sous le chevet du
lit où couche celui qui est atteint de
ce maléfice... Si l'homme & la femme
sont affligés de ce charme, il faut, pour
en être guéris, que l'homme pisse à
travers de l'anneau nuptial que la
femme tiendra pendant qu'il pissera.
Ayez la verge d'un loup nouvellement
rué, & étant proche de la porte
de celui que vous voudrez lier, vous
l'appellerez par son propre nom, &
aussi-tôt qu'il aura répondu, vous lierez
ladite verge du loup avec un lacet
de fil blanc, & il sera rendu si impuissant
à l'acte de Vénus, qu'il ne le seroit
pas davantage s'il étoit châtré. De
bonnes expériences ont fait connoître
que pour remédier, & même pour
[22]
empêcher cette espece d'enchantement,
il n'y a qu'à porter un anneau
dans lequel soit enchassé l'œil droit
d'une belette.
Réduisez en poudre le membre génital
d'un taureau roux, & donnez le
poids d'un écu de cette poudre dans
un bouillon composé de veau, de
pourpier & de laitue à la femme trop
convoiteuse; & l'on n'en sera plus
importuné, mais au contraire elle
aura a version de l'action vénérienne.
Quoique les alimens assaisonnés
avec laitue & pourpier soient fort
utiles pour amortir l'ardeur de la concupiscence,
néanmoins comme on
n'en trouve pas dans toutes les saisons,
& que l'on se pourroit ennuyer
de cette mangeaille, à l'imitation des
[23]
Israélites qui s'ennuyerent de la manne
du désert, la nature a pourvu de plusiers
autres remedes. Vous prendrez
donc de la poudre d'agate, que vous
mettrez dans une bande de linge que
l'on aura trempée dans la graisse de
loup, & l'on ceindre les reins de cette
bande en guise de ceinture; outre
cela, l'homme portera sur soi un cœur
de caille mâle, & la femme celui d'une
caille femelle, & il aura plus d'effet
s'il est enveloppé dans un morceau de
peau de loup.
Vous prendrez du jais ou jayer,
que vous réduirez en poudre impalpable;
vous en ferez prendre le poids
d'un écu à la fille; & si la fille a été
corrompue, il lui sera du tout impossible
de retenir son urine, & il faudra
qu'elle pisse incontinent: si au contraire
elle est chaste, elle retiendra son
urine plus qu'à l'ordinaire. L'ambre
[24]
jaune ou blanc, dont on fait des colliers
& des chapelets, produit la même
épreuve, si l'on s'en sert avec la même
préparation que le jais ou jayet: la
semence de porcelaine, la feuille de
glouteron & la racine, réduites en
poudre, & données à boire dans un
bouillon ou autre liqueur, servent
fort bien à la même épreuve.
Ayez une aiguillée de fil blanc,
mesurez avec ce fil la grosseur du cou
de la fille, puis vous doublerez cette
mesure, & vous en ferez tenir les
deux bouts à la fille avec ses dents,
& vous étendrez ladite mesure pour
faire passer sa tête dedans; si la tête
passe trop aisément, elle est corrompue,
si elle ne passe qu'à peine, assurez-vous
qu'elle est pucelle.
Prenez terre bénite de Venise demi-once,
un peu de lait provenant des
[25]
feuilles d'asperges, un quart d'once
de crystal minéral infusé dans un jus
de citron, ou jus de prunes vertes,
un blanc d'œuf frais avec un peu de
farine d'avoine: de tout cela faites un
bolus qui ait un peu de consistance,
& vous le mettrez dans la nature de la
fille défleurée après l'avoir seringuée
avec du lait de chevre & ointe de pommade
de blanc-rasis. Vous n'aurez pas
pratiqué ce secret quatre ou cinq fois,
que la fille reviendra en état de tromper
la matrône qui la voudroit visiter.
L'eau d'espargoute distillée avec du
jus de citron, étant seringuée plusieurs
jours de suite dans la nature de la fille,
produit le même effet en oignant la
partie avec pommade, comme est dit
ci-devant.
Ceux qui sont obligés de s'absenter
pour long-tems de leur maison, &
qui ont des femmes suspectes & sujettes
[26]
â caution, pourront, pour leur
sûreté, pratiquer ce qui suit. Il faut
prendre un peu des cheveux de la
femme, & les couper menus comme
poussiere; puis ayant enduit le membre
viril avec un peu de bon miel, &
jetté la poudre de cheveux dessus, on
procédera à l'acte vénérien avec la
femme, & elle aura ensuite un très-grand
dégoût pour le déduit: si le mari
veut la faire revenir de ce dégoût, qu'il
prenne de ses propres cheveux, qu'il
les coupe en poussiere comme il a fait
de ceux de la femme, & après avoir
oint son membre viril avec du miel &
de la civette, & l'avoir saupoudré de
ses cheveux, il procédera à l'acte avec
contentement de la femme.
Vous composerez une pommade
avec de la térébenthine de Venise, du
lait de feuilles d'asperges, du fromage
[27]
blanc die vache qui soit aigri, & du
crystal minéral, puis ayant frotté le
ventre, avec une petite éponge empreinte
de jus de citron, on appliquera
une emplâtre de ladite pommade sur
le ventre, & l'on réitérera ce secret
plusieurs fois, & on aura, contentement.
Il faut qu'elles aient une petite branche
de l'arbre qu'on appelle peuplier,
qu'elles la lient d'un ruban de fil blanc
avec leurs bas de chausses; & après
l'avoir mis sous le chevet da lit où
elles doivent dormir la nuit, elles se
frotteront les tempes avec un peu
de sang d'un oiseau que l'on nomme
huppe, & diront en se couchant l'oraison
suivante à l'intention de ce
qu'elles veulent savoir.
[28]
Kyrios clementissime, qui Abraham servo tuo dedisti uxorem Saram, & filio ejus obedientissimo, per admirabile signum indicati Rebeccam uxorem: indica mihi ancillæ tuæ quem sim nuptura virum, per ministerium tuorum spirituum Balideth, Assaibi, Abumalith. Amen.
Il faut le matin suivant, lorsqu'on
s'éveille, se remettre en esprit ce que
l'on aura vu en songe durant la nuit,
& si en dormant on n'a vu aucune
apparence d'homme, on doit continuer
pendant la nuit de trois vendredis
de suite; si la fille n'a point la représentation
d'homme durant les trois
nuits, elle peut croire qu'elle ne sera
point mariée. Les veuves peuvent faire
cette expérience aussi-bien que les
filles; avec-cette différence, qu'au lieu
que les filles se couchent du côte du
chevet, les veuves se doivent coucher
du côté des pieds du lit en y transportant
le chevet.
[29]
Il faut qu'ils aient da corail pulvérisée,
de la poudre d'aiman quils
délaieront ensemble avec du sang d'un
pigeon blanc; ils feront un petit morceau
de pâte, qu'ils renfermeront dans
une large figure, & après l'avoir enveloppée
dans un morceau de taffetas
bleu, ils la pendront à leur cou, &
mettront sous le linceul de leur chevet
une branche de myrthe, diront en
se couchant l'oraison ci-devant marquée,
en changeant seulement ces
mots: Ancillæ tuæ quem sim nuptura,
virum, en ceux-ci qui leur conviennent,
servo tuo quam sim nupturus
uxorem.
Prenez le. bouc d'un membre génital
d'un loup, le goil de ses yeux,
& celui qui est à sa gueule en forme
[30]
de barbe: réduisez cela en poudre par
calcination, & le faites avaler à la
femme sans qu'elle le sache, & l'on
pourra être assuré de sa fidélité; la
moëlle de l'épine da dos du loup fait
le même effet.
Prenez de la marjolaine sauvage,
de la franche marjolaine, du thym
sauvage, de la verveine, des feuilles
de myrthe, avec trois feuilles de noyer
& trois petites souches de fenouil,
tout cela cueilli la veille de la S. Jean
au mois de juin avant le soleil levé: il
faut les faire sécher à l'ombre, les
mettre en poudre & les passer au fin
ramis de soie; & quand on veut exécuter
ce joli badinage, il faut souffler
de cette poudre en l'air dans l'endroit
où est la fille, ensorte qu'elle la puisse
respirer, ou lui en faire prendre en
guise da tabac, & l'effet suivra de
prè. Un famoux auteur ajoute que
[31]
l'effet fera encore plus infaillible si
cette expérience gaillarde se fait dans
un lieu où il y ait des lampes allumées
avec de la graisse de lievre & de
jeune bouc.
Prenez une anguille morte par faute
d'eau, prenez le fiel d'un taureau qui
aura été tué par la fureur des chiens,
mettez-le dans la peau de cette anguille
avec une drachme de sang de
vautour, liez la peau d'anguille par
les deux bouts avec la corde de pendu,
& mettez cela dans du fumier chaud
l'espace de quinze jours, & puis vous
le ferez sécher dans un four chauffé
avec de la fougere cueillie la veille de
S. Jean; puis vous en ferez un bracelet,
sur lequel vous écrirez avec une
plume de corbeau, & de votre propre
sang, ces quatre lettres HVTY, & portant
ce bracelet autour de votre bras,
vous ferez fortune dans tous les lieux.
[32]
Vous assemblerez une infinité de
poissons en lieu où vous les pourrez
commodément prendre, si vous y
jettez la composition suivante. Prenez
sang de bœuf, sang de chevre noire,
sang de brebis, qui se trouve aux petites
entrailles, du thym, de l'origan,
de la farine, de la marjolaine, de l'ail,
de la lie de vin & de la graisse ou
moëlle des mêmes animaux; vous pilerez
tous ces ingrédiens ensemble &
vous en ferez de petites boules que
vous jetterez dans l'endroit de la riviere
ou de l'étang, & vous verrez
merveilles.
Pilez des orties avec de l'herbe de
quinte-feuille, & y ajoutez le suc de
jourbarbe avec du bled cuit en eau de
marjolaine & de thym, mettez cette
composition dans une nasse à prendre
du poisson, & en peu de tems elle sera
pleine.
[33]
Prenez coque du levant avec du
cumin, du fromage vieux, de la farine
de froment & de bonne lie de
vin; broyez tout cela ensemble & en
formez de petites pilules de la grosseur
d'un pois, & les jettez dans les
rivieres où il y a abondance de poissons
& que l'eau soit tranquille, &
tous les poissons qui tâteront de cette
composition s'enivreront & se viendront
rendre au bord, ensorte que
vous les pourrez prendre à la main,
& peu de tems après l'ivresse se passera,
& ils deviendront aussi gaillards
qu'ils étoient avant que d'avoir mangé
de ce appât.
La fleur de souci, avec la marjolaine,
farine de froment, de vieux
beurre, de la graisse de chevre avec
des vers de terre, broyés & mêlangés
ensemble, servent merveilleusement
[34]
pour attirer toutes sortes de poissons
dans la nasse on dans les filets.
Pour faire assembler les poissons
en un lieu dans la mer, vous prendrez
trois coquilles de celles qui croissent
aux rochers; & ayant tiré le poisson
qui se trouve dedans, vous écrirez
avec votre propre sang sur ces coquilles,
les deux mots suivans, JA SABAOTH;
& ayant jetté ces coquilles
dans l'endroit oû vous voulez que les
poissons s'assemblent, vous y en verrez
en moins de rien un nombre infini.
Pour prendre grand nombre d'écrevisses,
quand on aura découvert
les endroits où elles se tiennent, on y
mettra des nasses dans lesquelles on
aura jetté des morceaux de boyaux de
chevres ou quelques grenouilles écorchées,
& par ce moyen on en attirera
un nombre prodigieux des plus grosses.
[35]
Il faut avoir le plus giros crapaud
que l'on pourra trouver, & on l'enfermera
dans un pot de terre neuf
avec une chauve-souris, & l'on écrira,
en dedans du couvercle du pot,
ce mot, Achizech, avec du sang de
corbeau; l'on enterreta ce pot dans
le milieu du champ ensemencé, & il
ne faut pas craindre que les oiseaux
en approchent: quand les grains commenceront
à mûrir, il faut ôter ce
pot & le jetter loin du champ dans
quelque voierie.
Ayez un hibou ou chouette que
vous attacherez la nuit à un arbre de
la forêt ou bois taillis, & vous allumerez
proche de lui une grosse chandelle
qui fasse belle lumiere; plus,
deux ou trois personnes feront du
bruit autour de l'arbre avec des tambours,
[36]
les oiseaux viendront en foule,
se percher proche du hibou pour lui
faire la guerre, & il sera facile d'en
tuer tant que l'on voudra avec du
menu plomb.
Vous ferez tremper dans de bonne
eau-de-vie le grain qui sert de nourriture
aux oiseaux, avec un peu d'ellébore
blanc; & ceux qui mangeront
de ces grains en seront subitement
érourdis, ensorte qu'on les pourra
prendre à la main.
Si vous voulez prendre corneilles
& corbeaux vivans, vous ferez des
cornes de papier fort qui soit gris
bleu, vous les frotterez en dedans
avec de la glu, & y mettrez quelque
morceau de viande puante pour les attirer;
ensorte que fourrant leur tête
dans ces cornets, la glu les arrachera
à leurs plumes; & en étant affublés
[37]
comme d'un capuchon qui leur bouchera
la vue, quand ils voudront s'envoler,
ils ne pourront, & il sera facile
de les prendre.
Vous pourrez mêler de la noix
vomique dans la mangeaille des oiseaux,
qui, aussi-tôt qu;ils en mangeront,
tomberont en défaillance,
& il sera loisible de les prendre.
Si vous suspendez en dedans du colombier
le crâne d'un vieillard ou du
lait d'une femme qui allaitera une fille
de deux ans, assurez-vous que les pigeons
se plairont dans le colombier &
y muliplieront abondamment, soit
par les étrangers qu'ils attireront, &
tous y vivront paisiblement & sans
rancune.
J'ai lu dans les écrits d'un ancien
cabaliste, que pour empêcher que les
[39]
serpens & d'autres bêtes venimeuses
ne viennent molester de jour ni de
nuits les pigeons, il faut écrire avec du
sang de bléreau aux quatre coins du
colombier & aux fenêtres, ce mot
Adam, & vous ferez un parfum de
puce d'âne ou pas-d'âne: on croit
que la tête du loup suspendue au colombier,
produit un semblable effet.
Le livre de la maison rustique enseigne de bonnes pratiques pour bien
élever des pigeons, & l'expérience
fait connoître qu'on ne peut leur rien
donner de meilleur pour les engraisser
que de la pâte de fêves fricassées avec
du cumin & du miel.
Vous les empêcherez d'aboyer importunément
après vous, si vous portez
sur vous le cœur & les yeux d'un
loup desséchés: la grande antipathie
[40]
qui est entre le chien & le loup cause
cet effet qui a été souvent éprouvé.
Comme la morsure d'un chien enragé
est infiniment dangereuse, il est
bon d'avoir de prompts remedes pour
se garantir des suites funestes de cette
maligne, morsure. Vous pilerez donc
de la semence de choux avec du laserpitium
& de bon vinaigre, vous
en ferez une emplâtre que vous appliquerez
sur la plaie, que vous aurez
au paravant oinre avec huile de baume.
La racine fraîche d'églantier qui
sent bon, étant pilée & appliquée,
est, selon le sentiment de Pline, un
prompt remede contre la morsure
des chiens.... De bons auteurs naturalistes
assurent qu'en prenant du
poil de la bête enragée, & le faisant
brûler & en boire la cendre mise en
bon vin, procure guérison .... Les
cancres de riviere étant brûlés durant
les jours caniculaires, le 14 de
[41]
la Lune, lorsque le Soleil entre dans
le signe du Lion, & réduits en poudre,
on en donnera une demi-drachme
dans un bouillon au patient, soir &
matin durant 15 jours, & il guérira.
Galien assure que ce remede ne lui a
jamais manqué dans le besoin.... Je
conseille pourtant que l'on ne se fie
pas tellement à tous ces remedes, que
pour eux l'on néglige d'aller se baigner
à la mer, qui est le remede le
plus sûr & le plus éprouveé, & l'on
pourra pratiquer tous ces petits remedes
durant le chemin.
Si vous portez sur vous les yeux & le cœur d'un dogue, qui soit mort par violence, ne craignez pas que le loup vous approche, ainsi au contraire vous le verrez fuir comme un timide lapin .... Si vous suspendez la queue d'un loup qui ait été tué en carnage, dans la crêche ou étable d'un gros ou [42] menu bétail, aucun loup n'en abordera.... Le même effet arrivera pour tout un village, si aux avenues vous enterrez des pieces de loup.... J'ai lu dans les écrits d'un sage naturaliste, une maniere bien surprenante pour prendre des loups en grand nombre, voire même en dépeupler tout un pays qui en seroit infecté; il faut se pouirvoir d'une bonne quantité de poissons, qu'on appelle biemmi ou loups marins: en les éventrant on réserve le sang à part, & après les avoir bien écaillés & nettoyés, on les pilera dans un mortier avee de la chair d'agneau ou de jeunes brebis, & l'on portera cette composition dans le canton où l'on sait que les loups sont; on allumera un grand feu de charbon à l'opposition du vent; c'est-à-dire, que le vent aille da côté ou sont les loups, afin qu'il chasse la fumée que fera la composition de chair & de poisson que l'on mettra sur les charbons; laquelle fumée frappant l'odorat des [43] loups, les attirera en cet endroit; lesquels trouvant cet appât rôti, & pour peu qu'ils en mangent, en seront tellement étourdis, quils s'endormiront, & il sera aisé de les tuer.
Il y a tant de livres qui sont remplis
de secrets pour se garantir des incommodités
des animaux nuisibles, que je
ne suis pas d'avis de grossir inutilement
ce mien petit trésor des merveilles de
la nature, de ces sortes de secrets, qui
sont devenus trop communs pour être
ignorés de personne. Je passerai donc
à des choses plus curieuses & qui satisferont
davantage mes lecteurs.
Comme l'homme n'a rien de plus
estimable que sa raison, & qu'il lui
arrive souvent de la perdre, par l'excès
du vin, il est convenable de lui donner
quelque préservatif pour s'en garantir;
quand vous serez convié à
quelque repas, où vous craindrez de
succomber à la douce violence de
[44]
Bacchus, vous boirez avant que de
vous mettre à table deux cuillerées
d'eau de bétoine & une cuillerée de
bonne huile d'olive, & vous pourrez
boire du vin en toute sûreté.... Vous
prendrez garde que le verre ou la tasse
dans quoi on vous servira à boire, ne
sente point la sariette ou la rapure
d'ongles, car ces deux ingrédiens contribuent
beaucoup à l'ivresse... Si l'on
s'est laissé surprendre par le vin il
faut, pour l'homme, qu'il enveloppe
ses génitoires dans un linge qui soit
imbibé de fort vinaigre, & que la
femme qui a succombé à l'ivresse,
mette un semblable linge sur ses tetons,
l'un & l'autre reviendront en
leur bon sens.
J'ai éprouvé plus de cent fois que le
vin tourné se rétablit en la manière
suivante. Si c'est vers la saison des
vendanges, & que le raisin commence
à mûrir, vous en prendrez environ
[45]
cent grosses grappes des plus mûres:
vous ferez bien nettoyer un tonneau,
dans lequel vous mettrez deux brassées
de copeaux ou d'éclappes de bons
bois; vous arroserez ces éclappes du
jus de grappes de raisin, que vous
passerez avec la main, & jetterez ensuite
toutes les grappes sur les éclappes,
& ayant bien renfermé le tonneau
& mis en place, vous tirerez à
clair le vin tourné & le verserez sur
ce rapé, il n'y aura pas resté trois
jours, qu'il sera beau et bon à boire.
Vous ferez une décoction de fines
herbes; savoir, une poignée de chacune
des suivantes: marjolaine, thym,
laurier, myrthe, baie de genievre,
deux pelures de citron & autant d'orange;
vous ferez bien bouillir cela
dans vingt pintes d'eau, jusqu'à la réduction
de quinze pintes ou environ,
à proportion de la grandeur du tonneau
que vous aurez fait nettoyer,
[46]
pour recevoir votre vin tourné; vous
laverez bien ledit tonneau avec la décoction
toute bouillante, et l'en laisserez
imbiber; puis vous y mettrez deux
brassées de copeaux ou éclappes que
vous arroserez aussi de cette décoction,
vous tirerez le vin tourné à claire, le
laisserez reposer huit jours sur ce rapé
de copeaux, et il deviendra meilleur
qu'il n'était avant qu'il tournât.
J'ai appris d'un maître d'hôtel d'un
prince allemand cette autre manière
de raccommoder le vin troublé &
gâté: il faut faire sécher au four cinquante
grappes de bon raisin & un
demi-boisseau de coquilles d'amandes
douces, en sorte que ces coquilles
soient un peu rissolées; pendant qu'elles
s'accommodent au four il faut bien
battre et fouetter ensemble douze
blancs d'œufs jusqu'à les réduire
presqu'en écume, & les verser dans le
tonneau où est le vin gâté, & le rouler
[47]
pendant un petit espace de temps, puis
vous jettez dedans les coquilles d'amandes
& les raisins tout chauds & le
laissez reposer huit jours, & vous aurez
de beau & de bon vin.... Quand le
vin est devenu aigre, on le rétablit
avec du bled, que l'on fait cuire jusqu'à
ce qu'il crève, la mesure ou
quantité est la centième partie que
contient le tonneau.
Il faut de bon vin fort, dans lequel
vous mettrez du poivre long & du
levain de pain de seigle qui bien
aigre: il n'aura pas été exposé six heures
au grand soleil ou proche le feu,
qu'il sera de bon usage. On peut faire
du vinaigre sans vin en cette manière:
ayez la charge d'un cheval de poires
sauvages, pilez-les bien, & les laissez
fermenter durant trois jours dans un
tonneau, puis, durant trente jours,
vous les arroserez de deux pots d'eau
[48]
par jour, dans laquelle eau vous aurez
fait bouillir du gigembre [*gingembre] & du poivre
long; au bout de trente jours vous
presserez les poires pilées, & vous
aurez de bon vinaigre.
Passons de l'utile au délectable, &
réjouissons l'homme par d'agréables
liqueurs.... Pour faire d'excellent vin
grec, sur cent pots de bon vin fort,
vous mêlerez la décoction suivante:
six livres de bon sucre, du gingembre,
du galanga, de la graine de paradis,
du clou de girofle, de chacun quatre
onces, avec deux pelures de citron;
vous ferez bouillir tout cela dans six
pintes d'eau de fontaine, jusqu'à la
diminution de moitié, & après avoir
clarifié cette composition, vous la mettrez
dans le tonneau où sont les cent
pots de bon vin, & vous aurez du vin
grec excellent.... Pour le vin muscat,
vous prendrez de la réglisse, du polypode,
de l'anis, de la noix muscade,
[49]
du calamus aromaticus, de chacun
deux drachmes, vous pilerez tout cela
légérement, & l'ayant mis dans un sac
de toike fine, vous le suspendrez dans
un tonneau de vin blanc, ensorte que
le sac puisse aller jusqu'à la moitié du
tonneau, durant dix ou douze jours,
& vous aurez de bon vin muscat. Sur
la quantité des drogues susdites, le
tonneau ne doit être que d'un muid
ou trois années. Pour le vin de Malvoifie,
qui doit se boire promptement,
sur un tonneau d'un muid ou de trois
années, vous mettrez la composition
suivantes: vous prendrez quatre livres
de bon miel naturel & non sophistiqué,
une drachme de clous de girofles
pulvérisés, autant de gingembre & de
macis, quatre pintes d'eau de fontaigne;
vous ferez bouillir le tout ensemble
durant deux heures, & vous aurez soin
de l'écumer exactement; il faut que les
clos de girofle, le gingembre & le
macis, pulvérisés, soient liés dans un
linge blanc; & quand cette composition
[50]
sera faire, vous la mettrez à demi
tiede dans le tonneau, & la laisserez
reposer huit jours, & vous aurez de
bonne malvoisie.... Si vous en voulez
faire de plus exquises, vous prendrez
une drachme de musc & de bois d'aloës,
deux drachmes de canelle, de graine de
paradis & clous de girofles, avec deux
livres de bon sucre, pour la quantité
de cent pots de bon vin; le tout bouilli
dans quatre pintes d'eau.
Pour quatre pintes de vin, vous
préparerez les drogues qui suivent,
une livre de bon sucre fin, deux onces
de bonne canelle concassée grossièrement,
une once de graine de paradis,
autant de cardamomum, & deux
grains d'ambre gris du plus exquis,
broyée au mortier avec du sucre candi;
vous ferez de toutes ces drogues un
sirop clair, que vous purifierez en le
passant deux ou trois fois à l'étamine,
[51]
& vous mélangerez ledit sirop avec quatre pintes
d'excellent vin, et vous en aurez le meilleur
hypocras que l'on puisse boire.
Vous prendrez six livres des plus belles
cerises griottes que vous pourrez avoir.
Après en avoir ôté la queue et le noyau,
vous les mettrez au fourneau dans une
bassine bien nette, avec une pinte d'eau
de fontaine et les ferez bouillir durant une
forte heure. Ensuite, vous les passerez à
la chausse ou étamine en les écrasant et,
du jus qui en sortira, vous en ferez un
sirop, en y mettant trois livres de sucre
fin, quatre onces de cannelle, une once
de clous de girofle, une bonne muscade,
une once de graine de paradis, une once
de cardamome, quatre grains de musc,
autant d'ambre gris broyé au mortier
avec sucre candi, le tout légèrement
concassé. Quand le sirop sera fait et bien
clarifié, vous le mêlerez avec quatre pintes
de bonne eau-de-vie dans un grand bocal,
que vous boucherez bien, et l'exposerez
au grand soleil durant quinze jours et
vous aurez d'excellente eau clairette. Le
marc qui vous restera de ces drogues
est bon pour faire de l'hypocras commun,
en y ajoutant du sucre en la manière que
nous avons dite ci-devant.
[52]
Vour aurez la semence de melon de
bonne espèce, vous la mettrez infuser
durant deux jours dans un sirop qui
sera composé de framboises, de canelle, de
cardamomum, de deux grains de musc et
autant d'ambre gris; il faut que le sirop ne
soit pas épais et tiède quand vous y mettrez
la semence en infusion; il faut que la
terre où vous sèmerez soit bien préparée,
sur une couche de bon funier de cheval,
et avoir grand soin de ne les point trop
arroser et de les garantir des pluies trop
abondantes. Si vous êtes exact à toutes ces
choses, vous aurez des melons dignes de la
bouche d'un roi.
[53]
Il faut avoir un cerisier qui soit planté en
espalier, dans une bonne exposition au
soleil et en bon terroir, et qu'un habile
jardinier ente dextrement deux ou trois
ceps de bonne vigne sur ledit cerisier;
qu'on ait grand soin de le garantir des intempéries
de la fin de l'hiver et du printemps;
qu'on ne lui ne lui épargne ni le bon fumier,
ni l'eau quand il sera nécessaire, et
on verra quelque chose de bien merveilleux
au temps que les cerises seront mûres.
[54]
Vous prendrez une livre de sel végétal,
qui est composé artistement de fleur
de soufre, de salpêtre et de nitre; les
bons droguistes ont ce sel: vous le ferez
bouillir dans six pintes d'eau, avec deux
livres de bon froment nouveau, jusqu'à ce
que le froment commence à se crever, puis
vous passerez cette composition dans un
linge fort clair, et vous ferez rendre au froment
cuit toute l'humidité; après vous ferez
infuser dans cette liqueur autant que vous
pourrez de bon froment durant vingt-quatre
heures; quand la terre sera bien
préparée, vous y sèmerez ce froment infusé,
et ayant fait sécher le marc de la composition,
vous le pulvériserez et rejeterez
sur cette terre, et vous verrez, par expérience,
que le blé que vous aurez ainsi
semé produira vingt fois autant que le blé
commun: il est vrai qu'il ne faudrait pas
faire cela deux fois de suite dans la même
terre; car il en consume tellement la
graisse, qu'elle ne peut plus rapporter si elle
n'est bien fumée.
[55]
Vous aurez dix grosses écrevisses, que
vous mettrez dans un vaisseau rempli
d'eau, et les exposerez au soleil
durant dix jours, puis vous aspergerez avec
cette eau les semailles l'espace de huit
jours; et quand elle seront crucs, vous les
aspergerez huit autres jours de suite, et
vous verrez qu'elles prospéreront à merveille,
et qu'aucunes bêtes, soit rats, belettes
ou autres, n'en pourront approcher.
[56]
ZOROASTRE donne comme un secret infaillible,
pour connaître l'abondance
de la moisson pour l'année suivante,
de faire ce qui suit. Il faut, environ le quinzième
du mois de juin, préparer un petit
canton de terre, à la manière qu'on la prépare
ordinairement pour être ensemencée:
vous y semerez toutes sortes de semence, et
à cause que, dans cette saison, la chaleur est
brûlante et pourrait nuire à ce que la semence
germe et sorte plus commodément,
vous observerez après cela laquelle des semences
sera la mieux venue, et aura la plus
belle apparence dans le temps que la canicule
commence à régner sur l'horison; car
vous serez averti par cet indice que l'abondance
sera la semence qui sera la mieux
venue, et celles qui n'auront pas profité par
la préparation que vous aurez faite seront
stériles. Ainsi le judicieux laboureur prendra
sur cela ses mesures pour avoir une abondante moisson.
Vous observerez au printemps dans
quel état sont les noyers: car s'ils paraissent
chargés de feuillages avec peu
de fleurs, soyez assuré que la nature sera
avare dans la distribution de ses richesses;
si au contraire vous voyez grande abondance
de fleurs sur les noyers, et que la
quantité surpasse celle des feuilles, tirez en
augure de fertilité: les anciens ont fait le
même pronostic de l'amandier.
[57]
La puanteur est naturellement contraire à la santé de l'homme et elle est quelquefois mortelle, témoin ce qu'en écrit Fioraventus, qui dit que si l'on prend la crasse du sang humain, lorsqu les eaux et sérosités en sont dehors, et qu'après l'avoir fait sécher, si on la mêle avec du styrax et que l'on en brûle dans une chambre, la puanteur qui en exhale est [58] mortelle. Pour donc être garanti de ces mortelles infections, je vais proposer un souverain antidote, qui triomphera de toutes sortes de venins et de poisons.
vous prendrez dans la saison des
feuilles de millepertuis, avant qu'il ait jeté
sa fleur, autant que vous en poirrez tenir
dans vos deux mains. Mettez-les infuser
au soleil, dans quatre livres d'huile
d'olive, durant dix jours, puis vous les
exposerez sur le fourneau au bain-marie,
dans de l'eau chaude et ensuite vous en
exprimerez le suc à la presse et le mettrez
dans un vaisseau ou bouteille ou bocal de
verre fort et, quand le millepertuis sera
fleuri et en graine, vous mettrez une poignée
de cette semence et de ces fleurs
dans le bocal et le ferez bouillir sur le
feu au bain-marie l'espace d'une heure,
puis vous y ajouterez trente scorpions,
un evipère et une grenouille verte, dont
vous ôterez les têtes et les pieds et, après
les avoir fair encore bouillir un peu de
tems, vous y mettrez deux onces de chacune
des drogues suivantes, pilées ou
hachées:
[59]
racine de gentiane, de dictamum
blanc, de la petite & grande
fortelle ou sa racine, de la tormentille,
de la rhubarbe, du bol d'Arménie,
préparé, de bonne thériaque & un
peu d'émeraude pulvérisée. Vous exposerez
tout cela au soleil durant les
jours caniculaires, aprés avoir bien
bouché le bocal, & enfin vous le mettrez
en digestion, durant trois mois,
dans du fumier chaud; & après ce
tems vous passerez cette composition
dans un couloir, & la garderez précieusement
dans un vase d'étain ou de
verre fort, pour vous en servir. L'usage
est de s'en frotter autour du cœur,
aux tempes, aux narines, flancs &
au long de l'épine du dos, & vous
éprouverez que c'est un antidote contre
toutes sortes de venins. Il est bon
aussi pour guérir les morsures des
bêtes venimeuses.
La grande réputation que Paracelse
[60]
s'est acquise dans le monde par sa profonde
science, donne beaucoup d'autorité
à ce qu'il a laissé par écrit. Il
assure, comme une chose indubitable,
que si l'on fait des talismans suivant
la méthode qu'il en donne, ils
produiront des effets qui surprendront
ceux qui en feront l'expérience; &
c'est ce que j'ai éprouvé moi-même
avec grande admiration & un très-heureux
succès. Voici donc de quelle
maniere il en parle dans son archidoxe
magique.
Personne ne peut, sans témérité,
révoquer en doute que les astres &
planetes célestes n'aient des influences
dominantes sur tout ce qui est
dans ce bas univers; car puisque l'on
voit & que l'on éprouve sensiblement
que les planetes dominent, par leurs
influences sur l'homme, qui est l'image
de Dieu & avantagé de la raison;
à combien plus forte raison doit-on
croire qu'elles dominent & influent
sur les métaux, sur les pierres, & sur
[61]
tout ce que la nature & l'art peuvent
produire; puisque toutes ces choses
sont moindres que l'homme, & plus
propres à recevoir, sans résistance,
leurs influences étant privées de la
raison & libre arbitre, & que l'homme
a cet avantage qu'il peut se servit de
ces choses materielles, pour attirer en
sa faveur les influences des astres.
Mais ce qui est digne d'être su &
bien remarqué, cx'est que les sept planetes
n'influent jamais plus efficacement
que par l'entremise des sept métaux
qui leur sont propres, c'est-à-dire,
qui ont de la sympathie avec
leur substance; & à ce sujet les sages
cabalistes ayant connu par la sublime
pénétration de leurs sciences, quels
sont les métaux propres aux planetes,
ils ont déterminé l'or pour le Soleil,
au jour du dimanche, l'argent pour
la Lune, au lundi, le fer pour Mars,
au mardi, le-vif-argent pour Mercure,
au mercredi, l'étain pour Jupiter,
au jeudi, le cuivre ou l'airain
[62]
pour Vénus, au vendredi, & le plomb
pour Saturne, au samedi. Sur ce fondement,
nous donnerons ici la maniere
de faire des talismans, que les
anciens sages ont appellés les sceaux
des planetes.
[Compare with version in Agrippa:]
Ce talisman doit être composé avec
l'or le plus exquis & le plus pur, qui
est celui d'Arabie ou de Hongrie; on
en forme une plaque ronde, bien
polie des deux côtés; & sut un de ces
côtés on trace un quarré composé de
six lignes de chiffres, ensorte que
nombrant ces chiffres d'un coin à
l'autre, en forme de croix de saint
André, on trouve cent onze. Et ce
qui est mystérieux en cela, & dont
on doit être informé, c'est que les
nombres qui seront marqués dans
tous les talismans ou sceaux des planetes,
sont les nombres des grandes
étoiles qui sont sous la domination de
chaque planete, que Dieu leur attribue
[63]
comme leurs sujets, & c'est pour
cela que ceux qui sont versés dans
l'astrologie, appellent
les planetes précurseurs
ou étoiles premieres,
& ils connfluent de-là, qu'ils ont
les autres sous leur direction,
pour la distribution de leurs
influences. Sur l'autre côté de la plaque,
il faut graver la figure hiéroglyfique
de la planete, qui représente un
roi couronné dans son trône royal,
tenant de la main droite un sceptre,
ayant sur la tête le Soleil & le nom de
Jupiter, & montrant avec son sceptre
un lion rugissant à ses pieds. Et afin
que cette opération se fasse avec exactitude
& dans les circonstrances convenables,
vous ferez graver deux fers
bien propres à imprimer sur l'or tout
ce que j'ai dit ci-dessus, pour ne point
perdre le moment favorable de la
constellation, car il faut que l'impression
se fasse dans le tems que l'on aura
[64]
observé que le Soleil sera en conjonction
avec la Lune dans le premier degré
du Lion; & quand la plaque d'or
sera marquée des deux côtés avec les
fers susdits, vous l'envelopperez
promptement dans un linge fin. Ce
que le viens de dire des deux fers
gravés, doit pareillement s'entendre
pour la fabrique des talismans des autres
planetes; afin, comme il est dit,
que l'impression s'en fasse dans l'instant
favorable de la constellation; car
l'on doit savoir que c'est dans cet instant
que la planete répand & imprime
ses bénignes influences sur le talisman,
d'une maniere surnaturelle &
toute mystérieuse. Les propriétés de ce
talisman du Soleil consistent en ce
que la personne qui le portera avec
confiance & révérence, deviendra
agréable aux puissances de la terre,
aux rois, aux princes, aux grands seigneurs
dont on voudra acquérir la
bienveillance, on abondera en richesses
& en honneurs, & on sera estimé
de tout le monde.
Ce talisman doit être composé avec
le plus pur argent que l'on pourra
trouver, dont on fera une plaque
ronde. bien polie; & d'une côté l'on
gravera neuf lignes de chiffres, dont
chacune contiendra le nombre mystérieux de trois cent soixante-neuf,
comme il est respésenté ci-après dans
le quarré suivant; de l'autre côté de
la plaque, on imprimera l'image hiéroglyfique
[66]
de la planete, qui sera une
femme revêtue d'une robe ample &
large, ayant les deux pieds sur le milieu
d'un croissant dans sa main droite,
& une brilliante étoile sur sa téte, avec
ce mot, Lune. L'opération se doit
faire un lundi du printems, lorsque
l'on aura au premier degré du Capricorne
ou de virgo un aspect favorable
de Jupiter ou de Vénus. Il faudra
aussi envelopper le talisman dans
un linge blanc; & il sera grandement
utile pour garantir des maladies populaires;
il préservera les voyageurs
des périls & des insultes des voleurs;
il sera favporable aux laboureurs &
aux négocians.
[Compare with version in Agrippa:]
Ce talisman doit être formé sur
une plaque ronde & polie, du meilleur
fer de Carinthie, les nombres
mystérieux seront soixante-cinq; &
de l'autre côté de la plaque on formera
la figure hiéroglyfique de la planete,
[67]
qui représentera un soldat armé,
tenant de la main
gauche un bouclier, &
de la droite une épée nue,
ayant une étoile sur sa
tête, avec le nom de
Mars. Il faut que les insrumens qui serviront
à imprimer ce talisman, soient
de bon acier trempé, & que l'impression
se fasse dans le moment que l'on
aura observé que la Lune étant un
aspect bénin avec quelqu'autre planete
favorable, entre au premier degré
du signe du bélier ou du sagittaire;
& il sera même bon que la plaque du
talisman soit mise au fourneau ardent,
afin qu'elle soit plus propre à recevoir
la gravure des figures mystérieuses: &
quand elle sera refroidie, on l'enveloppera
dans un morceau de taffetas
rouge. Ce talisman aura la propriété
de rendre invulnérable delui qui le
le portera avec révérence; il lui donnera
une force & une vigueur extraordinaire;
il sera vainqueur dans les
[68]
combats où il assistera. La planete de
Mars influe si merveilleusement sur ce
talisman, quand il est fait avec exactitude,
que si on l'enterre dans les
fondemens d'une forteresse, elle devient
inexpugnable, & ceux qui en
veulent entreprendre l'attaque, sont
mis facilement en déroute. Et si on le
fabrique lorsque la constellation de
Mars est en opposition avec les planetes
favorables & rétrogrades, il porte
malheur par-tout où on le met, &
il y cause des dissentions, des révoltes
& des guerres intestines; je sais
qu'un grand homme d'état en fit porter
un semblable en Angleterre, au
tems de la révolution de Cromwel.
Ce talisman doit être formé sur une
plaque ronde de mercure fixé, (je
donnerai ci-après la maniere de fixer
le mercure pour les talismans, comme
je l'ai éprouvé moi-même.) Quand
la plaque est faite & polie, on imprime
[69]
avec les ferremens sur un des
côtés, le nombre mystérieux de deux
cent soixante, distribué en huit lignes,
comme on le voit ici représenté.
[Compare with version in Agrippa:]
Et de l'autre côté de la plaque on
imprimera la figure hiéroglyfique de
la planere de Mercure, qui représentera
un ange, ayant des aîles sur le
dos & à ses talons, tenant dans la
main droite un caducée en forme de
sceptre, & une étoile sur sa tête, avec
le nom de Mercure. Il faudre faire
l'impression des figures au moment favorable
[70]
de la constellation, comme
on aura observé, avant que de commencer
l'entreprise. Et quand elle sera
achevée, on enveloppera le talisman
dans un morceau d'étoffe de soie de
couleur de pourpre.
Ce talisman aura la propriété de
rendre discret & éloquent celui qui le
portera avec révérence, & le disposer
admirablement à être savant en toutes
sortes de sciences; & si on fait infuser
ce talisman seulement une heure dans
un verre de malvoisie, il rend la mémoire
si heureuse, qu'on reient tout
avec facilité; il peut même guérir
toutes sortes de fievres; & si on le met
sous le chevet du lit, il procure des
songes véritables, dans lesquels on
voit ce que l'on souhaite de savoir.
[Compare Agrippa, OP2.51.]
[Compare with version in Agrippa:]
Ce talisman doit être formé sur une
plaque ronde de cuivre bien purifié
& poli. On imprimera sur un de ses
côtés le nombre mystérieux de cent
septante cinq, distribué en sept lignes,
comme il est ici marqué.
[Compare with version in Agrippa:]
Ce talisman doit être formé sur
une plaque ronde, de plomb bien
affiné & purifié, & on imprimera sur
l'un des deux côtés le nombre mystérieux
de quinze distribué en lignes,
suivant la disposition que l'on voit ici.
[Compare with version in Agrippa:]
Et de l'autre côté de la plaque, on imprimera la figure
hiéroglyfique de la planete,
qui sera un vieillard barbu, tenant en
main une espece de pioche, en posture
d'un homme qui fouit la terre, &
au-dessus de sa tête une étoile, avec
ce mot, Saturne. On commencera
l'impression des figures mystérieuses
avec les ferremens au moment que
l'on aura prévu que la constellation
de Saturne est en aspect favorable, la
Lune entrant dans le premier degré
[75]
du signe du Taureau ou du Capricorne.
Et quand l'opération sera finie, vous
anvelopperez le talisman dans un
morceau d'étoffe de soie noire.
Ce talisman est d'un grand secours,
premiérement, pour les femmes qui
sont en mal d'enfantement, car elles
n'y souffrent presque point de douleur;
c'est ce qui a été éprouvé plusieurs
fois, avec un heureux succès,
par des personnes de qualité, qui
étoient sujettes à faire de mauvaises
couches. Il multiplie aussi & augmente
les choses avec lesquelles on
le met. Si un cavalier le porte dans sa
botte gauche, son cheval ne pourra
être aucunement blessé. Il a tous les
effets contraires à ceux-ci, lorsqu'on
le forme dans le tems que la constellation
de Saturne est dans une situation
funeste, & la Lune rétrograde
dans les signes susdits.
Il faut choisir un jour de mercredi
du printems, d'où l'on connoît que
la constellation de Mercure soit en
aspect bénin avec le Soleil & Vénus,
& après avoir invoqué & conjuré les
esprits & génies directeurs des influences
de cette planete, on préparera les
drogues nécessaires, en la maniere
suivante: sel ammoniac, verd de gris,
vitriol romain, deux onces de chacun
bien pulvérisé; on mettra le tout ensemble
dans une marmite de fer ou de
fonte neuve, avec trois pintes d'eau
de forge; que le tout bouille jusqu'à
la réduction d'une pinte, puis on y
jettera deux onces de bon mercure
que l'on remuera bien avec une espatule,
durant que tout bout ensemble,
jusqu'à ce que ces matieres deviennent
épaisses; ensuite on les laissera
refroidir, & on fera évacuer par la
[77]
filtration le peu d'eau qui restera; on
trouvera au fond de la marmite une
pâte de terre grise, que l'on lavera
avec de l'eau commune, deux ou trois
fois, faisant toujours évacuer l'eau
par filtration, puis on étendra ladite
pâte sur une planche de chêne bien
polie, & on la laissera sécher au soleil;
après quoi on y ajoutera deux onces
de terra merita, & autant de tutie d'Alexandrie
en poudre, & on mettra le
tout dans un creuset luté hermétiquement
avec un autre creuset, ensorte
que les deux sembent ne faire qu'un
seul vaisseau sans ouverture, & que
rien ne puisse s'évaporer quand il est
sur le feu de rectification; ces deux
creusets se lutent l'un sur l'autre avec
une pâte de terre grasse, de la fiente de
cheval, de la fine poudre de limaille
de fer; & il ne faut pas mettre le creuset
luté au fourneau, avant que cette
composition qui en fait la jointure,
soit bien séchée. Quand le creuset aura
été une heure au fourneau ardent, on
[78]
augmentera le feu jusqu'à ce que le
creaset en rougisse. A la troisieme
heure on augmentera le feu, en soufflant
toujours, puison laissera refroidir
le creuset, on le délutera & on
trouvera au fond le mercure en grenouille,
on le recueillera jusqu'aux
plus petits grains, & on remettra le
tout dans un autre creuset, avec un
peu de borax pour le fondre; ce qu'étant
fait, vous aurez un très-beau
mercure fixé, bien propre, pour sa
pureté, à former des talismans & des
anneaux mystérieux qui auront la propriété
de vous attirer les bénignes
influences de la planete de Mercure,
pourvu qu'on soit exact àles travailler
suivant les regles de l'art.
On se servira des plaques de même
métal dont on a parlé ci-devant, &
on commencera l'opération aux heures
[79]
& momens convenables aux bénignes
influences; sur un côté de la plaque
on imprimera, en forme de
carré, les caracteres qui sont marqués
ci-après; c'est à savoir, pour le
Soleil, ceux que l'on trouvera à la
premiere ligne. Pour la Lune, ceux que
l'on trouvera à la seconde ligne. Pour
Mars, ceux que l'on trouvera à la troisieme
ligne. Pour Mercure, ceux, que
l'on trouvera à la quatrieme ligne.
Pour Jupiter, ceux que l'on trouvera
à la cinquieme ligne. Pour Vénus,
ceux que l'on trouvera à la sixieme
ligne. Pour Saturne, ceux que l'on
trouvera à la septieme ligne. On pourra
graver sur l'autre revers de la plaque
les mêmes figures hiéroglyfiques dont
nous avons parlé, & on éprouvera de
merveilleux effets. Je ne doute point
quos, si ce mien livre tombe ès mains
des gens de petit esprit & de peu de
savoir, ils ne le taxent de superstitieux;
parce qu'ils s'imagineront que
les admirables merveilles dont je traite
[80]
se font par le ministere des mauvais
esprits: car, disent-ils, comment
peut-on comprendre qu'une plaque
de métal, chargée de quelques caracteres
& figure, opere des choses
qui surpassent les forces ordinaires
de la nature? J'argumenterois volontiers
contre ces sortes de personnes &
leur dirois: Vous croyez donc que les
mauvais esprits peuvent faire ces choses
qui surpassent l'ordre ordinaire de
la nature? Mais pourquoi ne croyez-vous
donc pas que le créateur de l'univers
soit assez puissant pour avoir
imprimé dans les créatures des secrets
dont les ressorts ne se remuent que de
telle ou telle maniere? Pourquoi faites-vous
difficulté de reconnoître que
celui qui a donné à l'aiman la vertu
secrette d'attirer à soi une masse pesante
de fer d'un lieu à un autre, est
assez puissant pour donner aux astres,
qui sont des créatures infiniment plus
parfaites que l'aiman, & que tout ce
qu'il y a de plus précieax sur la terre,
[81]
a des propriétés & des vertus secrettes,
qui surpassent la portée de nos esprits,
d'autant plus que ces astres sont régis
par des intelligences célestes qui reglent
leurs mouvemens?
Mais quelle difficulté peut-on faire
de croire quede certains caracteres ou
de certaines figures rangées sur une
plaque de métal, puissent produire
quelqu'effet surprenant, puisque l'on
croit & que l'on voit évidemment que
dans l'aiman de certaines petites parties
de matieres sphériques, acuës ou
triangulaires, rangées dans la nature
dans un certain ordre, produisent de
si admirables effets, non-seulement
d'attirer une mass de fer, mais de
tourner toujours l'aiguille des boussoles,
du côte de l'étoile polaire, & de
régler les cadrans au soleil, &c...
Je voudrois encore demander à ces
personnes scrupuleuses, pourquoi
dans la Suisse & aux pays'des Sueves,
où il y a grand nombre de serpens, à
cause des montagnes, pourquoi ces
[82]
serpens entendent-ils le grec, & craignent-ils
si sort la vertu efficace de ces
trois mots, osy, osya, osy, qu'ils
bouchent promptement une de leurs
oreilles avec le bout de leur queue &
abouchent l'autre contre la terre, afin
de ne pas entendre ces paroles, qui
les rendent immobiles & tout stupéfiés,
& incapables de nuire aux homines?
Si l'on me dit que c'est la nature
qui produit en eux cet instinct, pourquoi
la nature sera-t-elle moins ingénieuse
dans les autres créatures? &c...
Je révolterai peut-être bien des
gens contre moi, si je dis qu'il y a des
créatures dans les quatre élémens qui
ne sont ni de purs animaux, ni des
hommes, quoiqu'ils en aient la figure
& le raisonnement, sans en avoir
l'ame, raisonnable. Le célebre Paracelse
en parle encore plus clairement,
en disant que ces peuples des élémens
ne sont point de la tige d'Adam, quoiqu'ils
paroissent de véritables hommes,
mais que c'est un genre & une
[83]
espece de créatures, toujours différentes
de la nôtre. Porphire enchérissant
sur Paracelse, dit, que non-seulement
ces créatures sont raisonnables,
mais même qu'elles adorent & reconnoissent
Dieu par un culte de religion;
& pour preuve de son dire, il rapporte
une oraison très-sublime & très-mystérieuse
d'une de ces créatures qui
habitent dans l'élément du feu, sous
le nom de Salamandres; peut-être que
je ferai plaisir à mes lecteurs de leur
en donner une copie, qui sera utile
dans la suite.
Or, tous ceux d'entre les anciens
philosophes & les modernes de nos
derniers siecles, qui ont été persuadés
que les quatre élémens sont peuplées
de créatures raisonnables, les distribuent
en cette maniere. L'élément du
feu est habité par les Salamandres;
lélément de l'air est habité
par les Sylphes; l'élément de l'eau est habité
par les Nymphes; & l'élément de
la terre est habité par les Gnomes ou
Pygmées. Et ils croient que ces créatures
ont été faites par le créateur,
pour rendre des services importans
[86]
aux hommes, & les punir quand ils
sont rebelles à ses volontés.
On prétend que ces créatures extraordinaires
sont d'une nature spirituelle;
non pas d'une spiritualité qui
exclut toute matiere, mais d'une spiritualité,
qui n'admet pour fondement
substantiel, qu'une matiere infiniment
déliée, & autant imperceptible que
l'air; & sur ce principe, les sages cabalistes
qui ont bien connu la nature
de ces créatures élémentaires, ont dit
qu'elles ont sur routes autres qualités
celles de l'agilité & de la pénétrabilité;
ensorte qu'en un moment elles
peuvent venir de fort loin au secours
des homines, qui ont besoin de leur
ministere, & peuvent pénétrer, sans
fractions, les endroits où les hommes
sont détenus.
Pour ce qui regarde leurs mœrs,
ces peuples sont fort réglés, suivant
les loix de la nature, grands ennemis
des hommes qui vivent dans le déréglement
& contre les lumieres de la
[87]
raison. Et c'est sur ce principe que les
sages cabalistes, qui ont donné des
enseignemens pour parvenir à la découverte
des mysteres de la philosophie
occulte, ont recommande sur
toutes choses, aux sectateurs de cette
sublime science, de vivee en gens de
bien, exempts de toute impureté, de
toute débauche, & de tout ce qui s'écarte
de la droite raison; d'autant que
les plus grandes merveilles qui dépendent
de la science occulte; s'operent
par le ministere de ces peuples élémentaires
qui sont comme les canaux, ou
pour mieux dire, les économes des
influences, bénignes des astres.
Dans les siecles passés, où l'on vivoir
dans une plus grande modération
des passions, & avec moins de corruption
de la nature, ces peuples élémentaires
avoient beaucoup plus de
fréquentation avec les hommes que
dans nos derniers siecles, & on y voyoit
des prodiges qui donnoient de l'admiration,
parce qu'ils sembloient outrepasser
[88]
l'ordre naturel; mais si la corruption
de la nature ne régnoit, l'ignorance
y étoit si grande, que la plupart
des hommes attribuoient à magie ou
diablerie, presque tout ce qui se faisoit
par le ministere de ces peuples élémentaires;
c'est ce que l'on peut voir
dans les capitulaires de Charlemagne,
& dans les ordonnances qui furent
faites sous le regne de Pepin, & les
merveilles dont les histoires de ces anciens
tems sont mention, passent maintenant
pour des contes de fées. Je renvoie
aux savans écrits de Paracelse
ceux de mes lecteurs qui voudront
être instruits plus à fond de ces peuples
élémentaires, & des commerces
secrets, qu'ils ont avec les hommes.
Ceux qui ont voyagé dans les pays
septentrionaux, & sur-tout dans la
Laponie, ne peuvent pas ignorer les
services que les Gnomes y rendent aux
habitans de ces régions, soit pour les
garantir des périls, en les avertissant
lorsqu'ils travaillent, des prochains
[89]
eboulemens de terre, soit en leur faisant
connoître les endroits où les mines
sont plus abondantes en précieux
métaux.
Les Lapons sont si fort habitués aux
fréquentes apparitions des Gnomes,
que bien loin d'en être effrayés, ils
s'attristent, lorsqu'ils ne paroissent
point quand ils travaillent dans ies
minieres; parce que c'est une marque
que ces mines sont stériles en métaux,
quand les Gnomes n'y font pas leur
résidence; & c'est une créance populaire
que le créateur les a commis à la
garde des trésors souterreins, & qu'ils
ont la faculté de les dispenser comme
bon leur semble.
Ceux qui sont occupés à la découverte
des mines d'or & d'argent, observent
quelques cérémonies pour se
concilier la bienveillance des Gnomes,
afin qu'ils ne leur soient pas contraires
dans leurs entreprises; l'expérience
leur a appris qu'ils se plaisent fort aux
parfums, & c'est pour cela que les
[90]
sages cabalistes en ont ordonné de
propres à chaque jour de la semaine,
par rapport aux sept planetes; &
comme je sais par expérience que plusieurs
personnes ont réussi à la découverte
des trésors, par le moyen des
parfums, je veux bien, en faveur de
mes lecteurs, donner ici la vraie maniere
de les faire, afin qu'ils puissent
être agréables aux Gnomes gardiens
des trésors. Car il faut savoir, que de
toutes les créatures qui habitent dans
les quatre élémens, il n'y en a point
qui soient plus ingénieuses à nuire ou
à faire du bien aux hommes, suivant
les sujets qu'on leur en donne.
Tous les parfums se doivent faire
dans un petit réchaud de terre neuf,
sur du charbon de bois de coudrier
ou de laurier. Pour brûler le parfum,
il doit être allumé du feu que
l'on fait exprès avec le caillou d'un
[91]
petit fusil; il est bon même d'observer
que le caillou, la meche, l'allumette
& la bougie soient neufs, & qu'ils
n'aient servi à aucun usage profane;
car les Gnomes sont extrêmement difficiles,
& peu de chose les irrite. On
préparera donc pour le parfum du dimanche
les drogues suivantes; savoir,
la quatrieme partie d'une once de safran,
autant de bois d'aloës, autant
de bois de baume, autant de graine
de laurier, autant de clous de girofle,
autant de myrthe, autant de bon encens,
un grain de musc, un grain
d'ambre gris; il faut pulvériser & mêlanger
ensemble toutes ces drogues,
& vous en formerez de petits grains
avec un peu de gomme adragant, détrempée
dans de l'eau rose, & quand
ils seront bien secs, vous vous en servirez
dans l'occasion, en les jettant
trois à trois sur les charbons ardens.
Ce parfum doit être formé des drogues
suivantes. Vous prendrez une tête
de grenouille verte, les prunelles des
yeux d'un taureau blanc, de la graine
de pavot blanc, de l'encens le plus
exquis, comme storax, benjoin ou
oliban, avec un peu de camphre,
pulvérifez toutes ces drogues & les
mêlez ensemble, puis vous en formerez
une pâte avec da sang d'une
jeune oie ou d'une tourterelle, & de
cette pâce vous formerez de petits
grains pour vous en servir trois à
trois, quand ils seront bien secs.
Ce parfum doit être composé d'euphorbe,
de bdellion, de sel ammoniac,
de racines d'ellébore, de poudre
de pierre d'aimant & d'un peu de
fleur de soufre; vous pulvériserez le
[93]
tout ensemble, & ferez une pâte avec
du sang de chat noir & de la cervelle
de corbeau, & de cette pâte vous en
formerez ces grains pour vous en servir
trois à trois, dans les occasions.
Ce parfum doit être composé de
graine de frêne, de bois d'aloës, de
bon storax, de benjoin, de poudre
d'azur, de bouts de plumes de paon;
vous pulvériserez & incorporerez ces
drogues avec du sang d'hirondelle &
un peu de cervelle de cerf, vous en
ferez une pâte, & de cette pâte vous
en formerez de petits grains, pour
vous en servir trois à trois dans les
occasions, quand ils seront secs.
Ce parfum doit être de musc, d'ambre gris,
de bois d'aloës, de roses
seches, de corail rouge; pulvérisez
[94]
toutes ces drogues, & les incorporez
ensemble avec du sang de colombe
ou de tourterelle, & de la cervelle de
deux ou trois passeraux, vous en ferez
une pâte, & de cette pâte vous formerez
de petits grains, pour vous en
servir trois à trois dans les occasions,
quand ils seront bien secs.
Ce parfum doit être composé de
graine de pavot noir, de graine de
jusquiame, de racine de mandragore,
de poudre d'aiman & de bonne myrthe.
Vous pulvériserez bien toutes ces
drogues, & les incorporerez ensemble
avec du sang de chauve-souris & de la
cervelle de chat noir, vous en ferez
une pâte, & de cette pâte vous formerez
de petits grains pour vous en
servir trois à trois dans les occasions,
quand ils seront bien secs.
Nous avons dit avant que de donner
la maniere de faire ces parfums,
[95]
que les Gnomes sont de toutes les
créatures qui habitent les quatre élémens,
les plus ingénieuses à faire du
bien ou à nuire aux homines, suivant
les sujets qu'on leur en donne; c'est
pourquoi ceux qui travaillent aux minéraux
ou à la recherche des trésors,
étant prévenus de cela, font tout ce
qu'ils peuvent pour se les rendre agréables,
& se précautionner autant qu'ils
peuvent contre les effets de leur indignation;
& l'expérience a fait connoître
plusieurs fois que la verveine
& le laurier sont d'un bon usage pour
empêcher que les Gnomes ne nuisent
au travail de ceux qui sont occupés à
chercher sous terre les trésors. Voici
de quelle maniere Jamblic
& Arbatel en parlent dans leurs
secrets cabalistiques.
Lorsque par les indices naturels ou
surnaturels, c'est-à-dire, par la révélation
faite en songe, vous serez bien
assuré de l'endroit où il y aura un trésor,
vous ferez sur cet endroit le parfum
[96]
propre au jour auquel vous voudrez
commencer à fouir la terre, puis
vous planterez à main droite une
branche de laurier verd, & à main
gauche une branche de verveine, &
vous ferez l'ouverture de la terre entre
ces deux branches; & quand vous
aurez fait un creux de toute votre
hauteur, vous ferez de ces deux branches
une couronne que vous entourerez
autour de votre chapeau ou
bonnet, & au-dessus de cette couronne
vous attacherez le talisman
dont je vais donner ici le modele.
Si l'on est plusieurs, il faucque chacun
ait une couronne de même.
On le peut faire sur une plaque
d'étain fin & bien purifié, au jour &
heur de Jupiter; le thême du ciel
étant dans une heureuse situation, on
y formera d'un côté la figure de la
fortune, comme elle est ici représentée,
& de l'autre côté ces paroles, en
gros caractere:
OMOUSIN ALBOMATATOS
Et si l'on est plusieurs jours à travailler
avant que d'arriver à l'endroit
où est le trésor, on renouvellera chaque
jour le parfum qui sera propre au
jour, comme nous l'avons expliqué
ci-devant; ces précautions seront cause
que les Gnomes, gardiens du trésor,
ne seront point nuisibles, & même
vous aideront dans vos entreprises;
c'est une preuve dont j'ai été témoin
oculaire, avec un heureux succès,
dans le vieux château d'Orviete.
J'ai parlé ci-devant des indices naturels,
par lesquels on peut faire la
découverte des trésors, & je m'explique
plus nettement. Paracelse, dans
son traité de la philosophie occulte,
page 489, dit que pour avoir des indice
certains de lieux où il y a des
trésors & des richesses cachées, il faut
observer les endroits où durant la nuit
des spectres ou fantômes apparoissent,
ou qualqu'autre chose extraordinaire
qui épouvante les passans & ceux qui
habitent dans ces lieux, & particuliérement
[98]
la nuit du vendredi au samedi.
Si l'on y voit des feux volans,
des tumultes & des fracas, ou qualqu'autre
chose semblable, on peut
former une conjecture raisonnable,
qu'il y a dans ces lieux quelque trésor
caché.
Mais l'homme prudent n'en demeurera
pas là; il faut se donner de garde
d'être surpris par le rapport d'autrui,
& sur-tout de certaines gueusailles,
ou petites femmelettes, qui, sur des
visions chimériques, engagent les
honnêtes gens à des recherches inutiles:
il ne faut donc s'engager dans
ces sortes de recherches, que sur le
témoignage de gens qui ne soient
point suspects, c'est-à-dire, qui aient
de la probité, & qui soient d'un esprit
solide; & il sera encore plus sur
d'expérimenter par soi-même ces sortes
de visions, en faisant résidence sur
les lieux.
Il ne faut pourtant pas absolument
rebuter ceux qui nous font ces sortes
[99]
de rapports, mais en examiner prudemment
les circonstances, car je suis
témoin que, si on avoir voulu croire
Philippe d'Ortano, chirurgien-major
de la petite garnison du vieux château
d'Orviete, on auroit négligé l'entreprise
que l'on poussa à boit avec un
heureux succès; car, comme il étoit
grand parleur, & assez persuasif dans
ce qu'il disoit, il tournoit en ridicule
ce que l'on rapportoit des apparitions
que plusieurs domestiques & soldats
avoient eues dans le lieu où le trésor
fut trouvé.
Celui qui voudra s'appliquer à la
recherche d'un trésor prétendu caché,
doit examiner la qualité du lieu, nonseulement
par la situation présente de
ce lieu, mais par rapport à ce que les
anciennes histoires en disent; car on
doit remarquer qu'il y a de deux sortes
de trésors cachés. La premiere
sorte est de l'or & de l'argent, qui a
été sormé dans les entrailles de la terre,
par la vertu métallique des astres
[100]
& du terrein où il est. La second sorte
est de l'or & de l'argent monnoyé ou
mis en œuvre d'orfévrerie, & qui a
été déposé en terre pour diverses raisons,
comme de guerres, de pestes &
autres; & c'est ce que le sage rechercheur
de trésors doit examiner, en considérant
si ces circonstances conviennent
au lieu dont il est question. Ces
sortes de trésors d'or, d'argent monnoyé,
& de vaisselle d'orfévrerie se
trouvent ordinairement dans les débris
& masures des anciennes maisons
de qualité & châteaux, ou proche de
vieilles églises ou chapelles ruinées.
Et les Gnomes ne prennent point possession
de ces sortes de trésors, si ce
n'est que volontairement ceux qui les
déposent & enfouissent dans les lieux
souterreins ne les y invitent que par la
vertu des parfums & talismans faits
à ce sujet; & en cette conjecture, il
faut les en déposséder par de plus forts
parfums & talismans, comme nous
avons dit; ceux que l'on forme sous
[101]
les auspices de la Lune & de Saturne,
la Lune entrant dans les signes du
Taureau, du Capricorne ou de la
Vierge, sont les plus efficaces.
Il faut sur-tout que ceux qui sont
occupés à cette recherche ne s'épouvantent
pas; car il ne manque pas
d'arriver assez ordinairement que les
Gnomes, gardiens des trésors, fascinent
l'imagination des travailleurs,
par des représentations & visions hideuses;
mais ce sont des contes de
bonnes gens du tems passé, de dire
qu'ils étranglent ou tuent ceux qui approchent
des trésors qui sont en leur
garde, & si quelques-uns sont morts
dans les cavités souterreines, en faisant
la recherche, cela est peut-être
arrivé, ou par l'infection de ces lieux,
ou par l'imprudence des travailleurs,
qui n'appuient pas solidement les endroits
qu'ils creusent, quand ils sont
ensévelis sous les ruines. C'est un badinage
de dire qu'il faut garder un
profond silence en creusant: au contraire,
[102]
c'est le moyen de s'épouvanter
plus facilement par les imaginations
fantastiques; on peut donc sans scrupule
parler de choses indifférentes,
ou même chanter, pourvu qu'on ne
dise rien de dissolu & d'impur, qui
puisse irriter les esprits.
Si, en avançant le travail, on entend
plus de bruit qu'auparavant,
que l'on ne s'épouvante pas, mais
que l'on redouble les parfums, &
que quelqu'un de la compagnie récite
à haute voix l'oraison des Salamandres
que j'ai donnée ci-devant, & ce
sera le moyen d'empêcher que les esprits
n'emportent plus loin le trésor,
se rendant attentifs aux mystérieuses
paroles que l'on récitera, & pour
lord on doit redoubler vigoureusement
le travail: je ne dis rien qui
n'ait été éprouvé en ma présence avec
succès; le petit livre de l'Enchiridion
est bon dans ces occasions, & cause de
ses mystérieuses oraisons.
Il est arrivé qualquefois que les
[103]
Gnomes ont transmué les métaux
précieux en des matieres viles & abjectes,
& ont trompé les ignorans qui
n'étoient pas informés de leurs subtilités:
mais le sage & prudent fossoyeur, qui trouvera dans les entrailles
de la terre de ces sortes de matieres,
qui naturellement n'y doivent
pas être, les recueillera & les éprouvera
au feu, composé de bois de laurier,
de fougere & de verveine; le
charme se dissipant par ce moyen, les
métaux retourneront en leur premiere
nature; un signe assez ordinaire de
ces transmutations fantastiques, c'est
lorsque l'on trouve ces matieres viles
& sordides dans des vaisseaux, ou de
terre cuite, ou de pierre taillée, ou
d'airain; & pour lors il ne faut pas
les négliger, mais les éprouver au feu,
comme je viens de dire.
Je finirai sur cette matiere avec le
secret que donne Cardan pour connoître
si le trésor est dans un lieu où
l'on creuse. Il dit qu'il faut avoir une
[104]
grosse chandelle, composée de suif
humain, & qu'elle soit enclavée dans
un morceau de bois de coudrier, fait
en la maniere qui est représentée dans
la maniere suivante; & si la chandelle
étant allumée dans le lieu souterrein,
y fait beaucoup de bruit en pétillant
avec éclat, c'est une marque qu'il y a
un trésor en ce lieu; & plus on approchera
du trésor, plus la chandelle
pétillera, & enfin elle s'éteindra quand
on sera tout-à-fait proche; il faut
avoir d'autres chandelles dans des
lanternes, afin de ne pas demeurer
sans lumiere. Quand on a des raisons
[105]
solides pour croire que ce sont des
esprits des hommes désuns qui gardent
les trésors, il est bon d'avoir des
cierges bénis au lieu de chandelles
communes, & les conjurer de la part
de Dieu, de déclarer si l'on peut faire
qualque chose pour les mettre en lieu
de bon repos; & il ne faudra jamais
manquer d'exécuter ce qu'ils auront
demandé.
IL y a des suborneurs de peuple qui,
abusant de la crédulité & simplicité
des bonnes gens, se mettent en grand
crédit par des tours de souplesse, qui
en apparence ont quelque chose de
surnaturel: de ce genre est la mandragore
artificielle, avec laquelle ils contrefont
les oracles divins. Comme je
passois par Lille en Flandre, je fus
invité, par un de mes amis à l'accompagner
chez une vieille femme
qui se mêloit de ce badinage, & qui
passoit pour une grande devineresse,
[106]
& je découvris sa fourberie, qui ne
pouvoit être long-tems cachée qu'à
un peuple aussi grossier qui sont les
Flamands. Cette vieille nous conduisit
dans un petit cabinet obscur, éclairé
seulement d'une lampe, à la lueur de
laquelle on voyoit sur une table couverte
d'une nape une espece de petite
statue ou poupée, assise sur un trépied,
ayant le bras gauche étendu, tenant
de la même main gauche une petite
cordelette de soie fort déliée, au bout
de laquelle pendoit une petite mouche
de fer bien poli, & au-dessous il y
avoit un verre de fougere, ensorte que
la mouche pendoit dans le verre, environ
la hauteur de deux doigts. Et
le mystere de la vieille consistoit à
commander à la mandragore de frapper
la mouche contre le verre, pour
rendre témoignage de ce que l'on
vouloit savoir.
La vieille disoit, par exemple: Je
te commande, mandragore, au nom
de celui à qui tu dois obéir, que si
[107]
monsieur un tel doit être heureux
dans le voyage qu'il va faire, tu fasses
frapper la mouche trois fois contre le
verre; & en disant les dernières paroles,
elle approchoit sa main à une
petite distance, empoignant un petit
bâton qui soutenoit sa main élevée à
peu près à la hauteur de la mouche
suspendue, qui ne manquoit point de
frapper les trois coups contre le verre,
quoique la vieille ne touchât en aucune
façon à la statue ni à la cordelette,
ni à la mouche; ce qui étonnoit
ceux qui ne savoient pas la minauderie
dont elle usoit. Et afin de
duper les gens par la diversité de ses
oracles, elle défendoit à la mandragore
de faire frapper la mouche contre
le verre, si telle ou telle chose
devoit ou ne devoit pas arriver; par
exemple: Je te défends, mandragore,
au nom de celui à qui tu dois obéir,
que tu ne fasses point frapper la mouche
contre le verre, si monsieur un
tel doit mourir avant sa femme; &
[108]
mettant la main en la même posture
que j'ai dit, la mouche ne frappoit
point contre le verre.
Voici en quoi consistoit tout l'artifice
de la vieille, dont je m'aperçus
après l'avoir examinée un peu attentivement.
La mouche de fer, qui étoit
suspendue dans le verre au bout de la
cordelette de soie, étant fort légère &
bien aimantée, quand la vieille vouloit
qu'elle frappât contre le verre,
elle mettoit à un de ses doigts une
bague, dans laquelle étoit enchassé
un assez gros morceau d'excellent aimant;
de manière que la vertu magnétique
de la pierre mettoit en mouvement
la mouche aimantée, & lui
faisoit frapper autant de coups qu'elle
vouloit contre le verre; & lorsqu'elle
vouloit que la mouche ne frappât
plus, elle ôtoit de son doigt la bague,
sans qu'on s'en aperçût. Ceux qui
étoient d'intelligence avec elle, & qui
lui attiroient des pratiques, avoient
soin de s'informer adroitement des
[109]
affaires de ceux qu'ils lui amenoient,
& ainsi on étoit facilement dupé.
L'avidité de gagner de l'argent est
une vraie tyrannie dans le cœur de
l'homme, qui le rend ingénieux jusqu'à
la profanation des choses saintes.
Le poëte ancien avoit bien raison de
se plaindre en ces termes: Auri sacra
fames, quid non mortalia pectora cogis?
Je dis cela à l'occasion d'une autre
supercherie que j'ai vu pratiquer à ces
sortes de gens dont je viens de parler.
Ils avoient disposé une table carrée,
soutenue de cinq colonnes, une à
chaque coin, & une dans le milieu;
celle du milieu étoit un gros tuyau
de carton épais, peint en bois, la
table étoit percée à l'opposite de ce
tuyau, & un bassin de cuivre, aussi
percé, étoit mis sur le trou de la table;
& dans le bassin étoit une tête
de saint Jean, de gros carton, peinte
au naturel, qui étoit creuse, ayant
[110]
la bouche ouverte; il y avoit un portevoix
qui passoit à travers le plancher
de la chambre qui étoit au-dessous du
cabinet oû tout cet attirail étoit dressé,
& ce porte-voix aboutissoit au
cou de cette tête; de maniere qu'une
personne, parlant par l'organe de ce
porte-voix de la chambre d'en-bas,
se faisoit entendre distinctement dans
lre cabinet, par la bouche de saint
Jean. Ainsi le prétendu devin ou devineress,
affectant de faire qualque
cérémonie superstitieuse pour infatuer
ceux qui venoient consulter cette tête,
il la conjuroit au nom de saint Jean,
de répondre sur ce que l'on vouloit
savoir; & proposoit la difficulté,
d'une voix assez haute pour être entendu
de la chambre de dessous, par
la personne qui devoit faire la réponse,
par le porte-voix, étant instruite
à-peu-près de ce qu'elle devoit
dire.
Voici la maniere de faire un cierge
magique, au moyen duquel celui qui
le tiendra allumé, paroîtra sans tête.
Vous prendrez la peau dont le serpent
s'est nouvellement dépouillé, de
l'opiment, de la poix grecque, du
reupondique, de la cire vierge, & du
sang d'un âne; vous broierez toutes
ces choses ensemble, & vous les mettrez
bouillit à petit feu, durant trois
ou quatre heures, sans un vieux
chauderon plein d'eau de maraisl puis
les laissant refroidir, vous séparerez
la masse de vos drogues d'avec l'eau,
& vous en composerez un cierge,
dont le lumignon sera de plusieurs
fils d'un linceul oû un mort aura
été enséveli; & quiconque allumera
ce cierge, en sera éclairé & paroîtra
sans tête.
Si vous voulez que tous ceux qui
seront dans unr chambre paroissent
en forme de grands éléphans ou de
chevaux, vous ferez un parfum en
cette maniere. Il faut broyer de l'alkekenge
avec de la graisse de dauphin,
& en former de petits grains,
de la grosseur de grains de citron;
puis vous aurez de la fiente d'une
vache qui ne nourrisse point de veau;
vous ferez bien sécher cette fiente,
ensorte qu'on puisse en faire du feu,
& vous aurez le divertissement que
vous souhaiterez, pourvu que la
chambre soit si bien close, que la fumée
n'en puisse sortir que par la porte.
Pour faire paroître une chambre
pleine de serpens & d'autres figures
qui donnent de la terreur, vous y
[113]
allumerez une lampe qui soit garnie
de ce qui suit.
J'ai éprouvé en Flandre l'effet d'une
lampe pour délivrer de l'importun
croassement des grenouilles, & pour
leur imposer subitement silence; c'étoit
dans le château du sieur Tillemont,
dont les fossés étoient si remplis
de ces criards insectes, que l'on
avoit peine à reposer la nuit. Nous
fimes sondre de la cire blanche au
soleil avec de la graisse de crocodile
qui est à-peu-près comme l'huile de
baleine; & je crois même que cette
[115]
huile auroit le même effet que la
graisse de crocodile qui est assez rare
en ce pays. Nous garnîmes une lampe
de cette composition avec un assez
gros lumignon, & elle ne fut pas
si-tôt allumée & posée sur le bord du
fossé, que les grenouilles cesserent
leur croassement.
J'avoue que je n'a jamais éprouvé
le secret de la main de gloire; mais
j'ai assisté trois fois au jugement définitif
de certains scélérats qui confesserent
à la torture s'être servis de la
main de gloire dans les vols qu'ils
avoient faits; & comme dans l'interrogatoire
on leur demanda ce que c'étoit,
& comment ils l'avoient eue, &
quel en étoit l'usage, ils répondirent,
premiérement, que l'usage de la main
de gloire étoit de stupéfier & rendre
[116]
immobiles ceux à qui on la présentoit,
ensorte qu'ils ne pouvoient non plus
branler que s'ils étoient morts; secondement,
que c'étoit la main d'un pendu;
troisiémement, qu'il falloit la préparer
de la maniére suivante. On prend
la main droite ou la gauche d'un pendu
exposé sur les grands chemins; on l'enveloppe
dans un morceau de drap
mortuaire, dans lequel on la presse
bien pour lui faire rendre le peu de
sang qui pourroit être resté; puis on la
met dans un vase de terre avec du zimat,
du salpêtre, du sel & du poivre
long, le tout bien pulvérisé: on la laisse
durant quinze jours dans ce pot; puis
l'ayant tirée on l'expose au grand soleil
de la canicule, jusqu'à ce qu'elle
soit devenue bien séche; & si le soleil
ne suffit pas, on la met dans un four
qui soit chauffé avec de la fougere &
de la verveine; puis l'on compose une
espece de chandelle avec de la graisse
de pendu, de la cire vierge & du sisame
de Laponie, & l'on se sert de cette main
[117]
de gloire comme d'un chandelier, pour
y tenir cette chandelle allumée; &
dans tous les lieux où l'on va avec ce
funeste instrument, ceux qui y sont
demeurent immobiles; & sur ce qu'on
leur demanda, s'il n'y avoit point de
remede pour ce garantir de ce prestige,
ils dirent que la main de gloire devenoit
sans effet, & que les voleurs ne
pourroient s'en servir si on frottoit
le seuil de la porte de la maison, ou
les autres endroits par oû ils peuvent
entrer, avec un onguent composé de
siel de chat noir, de graisse de poule
blanche & du sang de chouette, &
qu'il falloit que cette confection fût
faite dans la temps de la canicule.
A propos de ce que je viens de dire
de la déclaration que les scélérats
avoient faite étant exposés à la gêne,
je rapporterai par le détail de ce que
[118]
j'ai appris du sieur Bamberge, fameux
juge criminel d'Oxfort. Il m'a dit qu'il
avoit assisté plusieurs fois au jugement
criminel de certains scétérats, qu'on
ne pouvoir presque pas convaincre
que par leur déposition, attendu que
leurs crimes avoient été commits si
secrétement, & avec de relles précautions,
qu'on ne leur pouvoir produire
suffisans témoins, quoiqu'il y eût de
fortes présomptions contr'eux, & que
ces gens se fioient si fort à des secrets
qu'ils avoient, de se rendre insensibles
à la gêne, qu'ils se constituoient
volontairement prisonniers pour se
purger de ces prétendues présomptions.
Il y en a qui se servent de certains
paroles, prononcées à voix
basse; & d'autres de petits billets
qu'il cachent en quelque partie de
leur corps. Voici trois vers qu'ils
prononcent dans le tems qu'on les
applique à la gêne.
Voici d'autres paroles qu'ils prononcent
lorsqu'ils sont actuellement
appliqués à la torture: Comme le lait
de la benoite & glorieuse Vierge Marie
a été doux & souef à Notre-Seigneur
Jesus-Christ, ainsi cette torture & corde
soient douces & soueves à mes membres.
Le premier que je reconnus se servir
de ces sortes de charmes, nous surprit
par le constance qui étoit au-dessus
de nature; car après la premiere serre
de la gêne qu'on lui eut donnée, il
parut dormir auffi tranquillement
que s'il eêt été dans un bon lit, sans
se lamenter, plaindre, ni crier; &
quand on eut continué la serre deux
ou trois fois, il demeure immobile
comme une statue de marbre; ce qui
[120]
nous fit soupçonner qu'il étoit muni
de quelque enchantement, & pour en
être éclairci, on le fit dépouiller nu
comme la main; & aprè une exacte
recherche, on ne trouva autre chose
sur lui qu'un petit papier où étoit la
figure des trois rois, avec ces paroles
sur le revers: Belle étoile, qui a délivré
les mages de la persécution d'Hérode,
délivre-moi de tout tourment.
Ce papier étoit fourré dans son oreille
gauche. Or, quoiqu'on lui eût ôté ce
papier, il ne laissa pas d'être, ou au
moins de paroître insensible aux toutmens;
parce que lorsqu'on l'y appliquoit
il prononçoit à voix basse, entre
ses dents, certaines paroles qu'on ne
pouvoit entendre distinctement; &
comme il persévéra constamment dans
la négation, on fut obligé de la
renvoyer en prison jusqu'à ce qu'on
eût quelques preuves plus fortes contre
lui. On dit que l'on peut faire cesser
l'effet de ces paroles mystérieuses
en prononçant quelques versets de
[121]
l'écriture sainte, ou des heures canoniales,
comme sont les suivantes:
Mon cœur a proféré chose bonne; je
dirai toutes mes actions au roi, &
lui déclarerai mes œuvres. Le Seigneur
ouvrira mes levres, & ma bouche annoncera
vérité. Que la méchanceté du
pécheur soit confondue; tu perdras,
Seigneur, tous ceux qui disent le mensonge.
Il y a plusieurs siecles que la coutume
étoit de recevoir les criminels
à prouver leur innocence par l'expérience
du feu; mais soit que l'on ait
considéré que cette maniere d'agir ne
fût pas légitime, parce que c'étoit en
quelque façon tenter Dieu sur l'innocence
des personnes accusés; soit
aussi que l'on ait reconnu qu'il pouvoir
y avoir de la fraude dans ces
épreuves, la coutume en a été entiérement
abolie. En effet, on avoit
[122]
trouvé, dès ces tems-là, le moyen de
suspendre l'activité du feu, suivant ce
qu'en disent les anciens historiens. Et
voici ce que j'ai recueilli de plus vrai-semblable:
il faut faire un onguent
composé de suc de bismauve, de glaire
d'œuf frais, de semence d'une herbe
que l'on appelle sphylion ou herbe
aux puces, de la chaux en poudre,
du suc de raifort; bien piler & mêler
tout cela ensemble, s'en frotter par
tout le corps, si on veut faire l'épreuve
entiere, ou les mains seulement, si l'on
ne veut éprouver le feu qu'en cette
partie; & on laissera sécher cet oignement,
& on s'oindra derechef jusqu'à
trois fois, & ensuite on pourra hardiment
soutenir l'épreuve du feu, sans
crainte d'en être endommagé.
Vous prendrez d'un puissant vin
vieux, fort en couleur, violent; &
sur deux pintes vous mettrez en infusion
[123]
un caillou de bonne chaux vive
du poids de demi livre ou environ,
quarante onces de soufre vif, autant
de bon tartre de Montpellier, autant
de sel commun; & tout cela étant pilé
& mêlé ensemble dans un bon alambic
bien luté, vous distillerez à petit feu
jusqu'à trois fois votre eau ardente,
que vous conserverez, pour votre
usage, dans un bocal de verre fort:
quelques-uns se contentent de distiller
de la serpentine infusée dans du vin
& de la chaux vive.
Ce feu est si violent, qu'il brûle
tout ce à quoi il est appliqué, sans
qu'il puisse être éteint, si ce n'est avec
de l'urine, du fort vinaigre, ou du
sable. On le compose avec du soufre
vif, du tartre, de la sarcocole, de la
picole, du sel commun recuit, du
pentreol & de l'huile commune; on
fait bien bouillir toutes ces drogues
ensemble, jusqu'à ce qu'elles consument
[124]
un morceau de toile qu'on jettera dedans.
Il les faut remeur avec une spatule de
fer et il ne faut pas s'exposer à faire cette
composition dans une chambre, mais dans
une cour, car, si le feu prenait, on serait
bien embarrassé à l'éteindre.
Je quitte ces matières violentes, pour
dire un mot de la paix. J'ai lu, dans le
très curieux livre des secrets du Roi Jean
d'Aragon, que si quelqu'un, ayant
observé que le Soleil est entré au signe
de la Vierge, a soin de cueillir de la
fleur de souci, qui a été appelée, par les
anciens, Epouse du Soleil, et si on l'enveloppe
dans des feuilles de laurier avec une
dent de loup, personne ne pourra parler
mal de celui qui les portera sur lui et il
vivra dans une profonde paix et tranquillité
avec tout le monde.
On voit dans un vieux mémoire de
l'Histoire de France sous le règne de
Charles VII, que ce prince étant dans
une extrême consternation de voir son
royaume accablé de guerres, eut recours à
un saint ermite, pour se recommander à
ses prières. Le saint homme lui donna
une iumage de Véronique, avec la suivante
oraison, qu'il avait écrite sur le revers
de l'image, de sa main — assurant que,
s'il la portait dévotement et récitait, tous
les jours, la susdite oration, ses affaires
se rétabliraient de bien en mieux. Ce qui
arriva effectivement peu de temps après,
d'une manière que l'on peut dire miraculeuse,
par le service que lui rendit la
Pucelle d'Orléans. Et c'est ce qui a donné
occasion à la dévotion que plusieurs personnes
ont de porter cette image, et de
réciter cette oraison:
[126]
Pax Domini nostri Jesu-Christi sic
semper mecum per virtutem Heliæ prophetæ,
cum potestate & efficacia faciei
Domini nostri Salvatoris & dilectissimæ
Matris ejus sanctæ Mariæ Virginis,
& per caput Sancti Joannis-Baptistæ,
& per duodecim Apostolos,
& per quatuor Evangelistas, & per
sanctos omnes Martyres Dei, Confessores,
Virgines, Viduas, Archangelos,
Angelos, & omnes denique celestes
Hierarchias. Amen.
Vous recueillerez de l'herbe que
l'on appelle armoise, dans le tems
que le Soleil fait son entrée au premier
degré du signe du Capricorne; vous le
laisserez un peu sécher à l'ombre, &
en ferez des jartieres avec la peau d'un
jeune lievre; c'est-à-dire, qu'ayant
coupé la peau du lievre en courroies
de la largeur de deux pouces, vous
en ferez un redouble, dans lequel
vous coudrez ladite herbe, & les porterez
[127]
aux jambes: il n'y a point de
cheval qui puisse suivre long-tems un
homme de pied, qui est muni de ces
jartieres. Si vous faites pisser sur vos
jambes une fille vierge avant le Soleil
levé, non-seulement vous serez soulagé
de la lassitude du jour précédent,
mais aussi vous ferez ce même jour
beaucoup plus de chemin qu'à votre
ordinaire sans vous lasser. Observez
le tems que la Lune sera en conjonction
avec Mercure; & l'observation
sera encore meilleure, si elle se fait
un mercredi du printems; puis vous
prendrez un morceau de cuit de peau
d'un jeune loup dont vous ferez deux
jartieres, sur lesquelles vous écrirez
avec votre sang les paroles suivantes:
Abumalith cados ambulevit in fortitudine
cibi illius, & vous serez étonné de
la vîtesse avec laquelle vous cheminerez,
étant muni de ces jartieres à vos
jambes. De peur que l'écriture ne s'efface,
il sera bon de doubler la jartiere
d'un padou de fil blanc du côté de l'écriture.
[128]
Il y a encore une maniere de
faire la jartiere que j'ai lue dans un
vieux manuscrit de lettres gothiques:
en voici la recette. Vous aurez les
cheveux d'un larron pendu, desquels
vous ferez des tresses dont vous formerez
des jartiers, que vous coudrez
entre deux toiles, de telle couleur
qu'il vous plaira: vous les attacherez
aux jambes de derriere d'un jeune
poulain; puis en le forçant de marcher
en reculant environ vingt pas,
vous direz les paroles suivantes: Sicut
ambulat Dominus sabaoth super pennas
ventorum, sicut ambulabo super terram;
& vous laisserez échapper le poulain,
& le ferez courir à perte d'haleine, &
vous vous servirez avec plaisir de ces
jartieres.
Vous cueillerez le lendemain de la
Touffaint une forte branche de sureau,
dont vous ferez un bâton que
vous approprierez à votre mode;
[129]
vous le creuserez en ôtant la moëlle
qui est dedans, après avoir garni le
bout d'en-bas d'une virole de fer;
vous mettrez au fond du bâton les
deux yeux d'un jeune loup, la langue
& le cœur d'un chien, trois lézards
verts, trois cœurs d'hirondelles; &
que tout cela soit séché au soleil entre
deux papiers, les ayant auparavant
sou poudrés de fine poudre de sal-pêtre;
& vous mettrez par-dessus tout
cela dans le bâton sept feuilles de verveine,
cueillies la veille de saint Jean-Baptiste,
avec une pierre de diverses
couleurs, que vous trouverez dans le
nid de la huppe, & vous boucherez
le haut du bâton avec une pomme de
buis, ou telle autre matiere que vous
voudrez, & soyez assuré que ce bâton
vous garantira des périls & incommodités
qui ne surviennent que
trop ordinairement aux voyageurs,
soit de la part des brigands, des bêtes
féroces, chiens enragés & bêtes venimeuses;
il vous procurera aussi la
[130]
bienveillance de ceux chez qui vous
logerez.
Vous mêlerez dans l'avoine du cheval
une poignée de l'herbe appellée
satyrion, que vous hacherez bien
menue, vous oindrez le haut de ses
quatre jambes en dessous du ventre
avec de la graisse de cerf; & quand
vous serez monté dessus prêt à partir,
vous lui tournerez la tête du côté du
soleil levant; & vous penchant sur
son oreille gauche, vous prononcerez
trois fois, à voix basse, les paroles
suivantes, & vous partirez aussi-tôt:
Gaspard, Melchior, Merchisard. J'ajoute
à ceci, que si vous suspendez
au cou du cheval les grosses dents
d'un loup qui aura été tué en coutant,
le cheval ne sera pas fatigué de sa
course.
DES TALISMANS
DE L'ANTIQUITÉ DES
TALISMANS, LEUR ORIGINE
ET USAGES D'ICEUX.
FIGURES DES SEPT PLANÈTES
Figures des Talismans
Les talismans de Paracelse.
Talisman en sceau du Soleil.
6
32
13
3
33
23
7
31
27
28
28
30
19
14
16
15
23
24
18
20
22
21
17
13
32
22
10
19
26
12
36
15
15
14
18
13
[65]
Talisman au sceau de la Lune
Talisman ou sceau de Mars.
14
10
5
12
18
20
12
6
32
24
21
27
14
9
15
22
13
19
15
26
23
1
20
16
18
Talisman de Mercure au mercredi.
8
8
59
43
4
64
63
11
49
16
14
52
52
14
10
56
41
43
22
24
34
29
18
49
32
34
35
29
29
38
39
24
40
32
27
37
30
30
31
33
17
47
46
21
20
43
42
24
9
55
54
12
13
51
50
16
64
12
3
12
50
6
77
57
Talisman de Jupiter.
16
3
2
13
15
15
1
3
9
6
7
12
4
14
14
2
Talisman de Vénus, au vendredi.
22
47
16
41
10
35
4
25
23
48
17
42
11
9
30
6
24
49
18
36
12
13
31
7
25
43
19
37
30
14
32
1
26
44
20
21
39
8
32
2
17
45
46
15
40
9
35
3
27
Talisman de Saturne, au samedi.
2
4
9
7
5
3
6
1
8
Maniere de faire le mercure pour en
former des plaques à faire des talismans.
Pour construire d'autres talismans avec
les caracteres que les anciens cabalistes
ont appropriés aux sept planetes.
[38. Des peuples qui habitent les quatre élémens, sous les
noms des Salamandres, des Gnomes, des Sylphes & des Nymphes.]
Oraison de Salamandres.
Immortel, éternel, ineffable & sacré
pere de toutes choses, qui est porte sur le
charriot roulant sans cesse des mondes
qui tournent toujours. Dominateur des
campagnes éthéreennes, où est le trône
de ta puissance, du haut duquel tes yeux
redoutables découvrent tout, & tes
saintes oreilles écoutent tout. Exauce tes
enfans, que tu as aimés dès la naissance
[84]
des siechs; car ta durée & grande &
éternelle majesté resplendit au-dessus du
monde & au ciel des étoiles. Tu es élevé
sur elles, ô feu étincelant, & tu t'allumes
& t'entretiens toi-même par ta propre
splendeur, & il sort de ton essence
des ruisseaux intarissables de lumieres
qui nourrissent ton esprit infini. Cet esprit
produit toutes choses, & fait ce trésor
inépuisable de matiere, qui ne peut manquer
à la génération qu'il environne toujours
à cause des formes sans nombre dont
elle est enceinte, & dont tu l'as remplie
au commencement. De cet esprit tirent
aussi leur origine ces rois très-saints qui
sont debout autour de ton trône, & qui
composent ta cour, ô pere universel, ô
unique, ô pere des bienheureux mortels
& immortels! Tu as créé en particulier
des patiences qui sont merveilleusement
semblables à ton éternelle pensée & à
ton essence adorables. Tu les as établies
supérieures aux anges qui annoncent au
monde tes volontés. Enfin, tu as crée
une troisieme sorte de souverains dans les
[85]
élémens. Notre continuel exercise est de
te louer & d'adorer tes desirs. Nous brûlons
du desir de te posséder. O pere! ô
mere, la plus tendre des meres! O exemple
admirable des sentimens & de la
tendresse des meres. O fils, la fleur de
tous les fils! O forme de toutes les forme!
Ame, esprit, harmonie & nombre
de toutes choses, conserve-nous & nous
sois propice. Amen.
Parfum du dimanche, sous les auspices
du Soleil.
[92]
Parfum du lundi, sous les auspices de la Lune.
Parfum pour le mardi, sous les auspices
de Mars.
Parfum du mercredi, sous les auspices
de Mercure.
Parfum du vendredi, sous les auspices
de Venus.
Parfum du samedi, sous les auspices de
Saturne.
Tromperie de la mandragore artificielle.
Autre tromperie par la tête de S. Jean.
[111]
Subtilités naturelles, qui ont quelque
chose qui donne de l'admiration.
[112]
Autre au même sujet.
Autre au même sujet.
Autre au même sujet.
De la maine de gloire dont se servent
les scélérats voleurs, pour entrer
dans les maisons de nuit sans empêchement.
Autre pour rendre un homme ou femme
insensible à la torture, ensorte qu'on
ne pourra rien tirer de leur confession.
[119]
Imparibus meritis tria pendant corporæ ramis.
Dismas & Gestas in medio est divina potestas,
Dismas damnatur, Gestas as astra levatur.
Onguent par le moyen duquel on peut
s'exposer dans le feu sans être brûlé.
[48.] Pour l'eau ardente qui sert à une infinité
de grandes opérations.
[49.] Pour faire le terrible feu grégeois.
[50.] Pour avoir la paix.
[125]
[50b.] Autre, sue le même sujet.
[51.] Secret de la jartiere pour voyageurs.
[52.] Secret du bâton du bon voyageur.
[53.] Secret pour faire faire à un cheval plus
de chemin en une heure, qu'un autre
n'en pourra faire en huit heures.